mardi 20 décembre 2011

MP 73


Chaque jour, des milliers de personnes prennent la ligne de métro 6.
Des milliers d'ombres qui baissent la tête ou regardent vaguement au loin, perdus dans leurs feuilles de choux ou leurs musiques. Un homme qui passe, une famille qui rentre, une sonnerie, un changement, un terminus.
Le train s'engouffre cahin-caha dans les tunnels sombres, s'élève au-dessus des arbres dans un fracas de tôles mal huilées. Toute la journée, les reptiles d'acier vont et viennent, presque discrètement, sur les viaducs centenaires.
Y a-t-il seulement une âme qui ait remarqué un petit détail dans le wagon de tête (direction Nation) ou de queue (direction Étoile)?

Chaque jour, au-dessus des voyageurs, une petite vis se dodeline dans l'écrin de plastique opaque du plafonnier.
On se demande bien ce qu'elle fait là. Comme si sa vie au service de la RATP ne lui convenait plus, elle a quitté ses congénères et essayent de voyager.
Elle est comme un passager clandestin au sein de la rame. Peu de gens doivent la voir; et vu le temps depuis lequel elle est coincée dans son écrin de plastique, le personnel RATP s'occupant de la maintenance ne doivent pas non plus lui octroyer une quelconque attention.

Tous les jours, elle parcourt des dizaines de kilomètres. Il y a environ 45 trains sur cette ligne, mais si d'aventure vous vous trouvez entre Place d'Italie et Denfert-Rochereau (direction Étoile) vers 11h10, n'hésitez pas à grimper dans la dernière rame et à jeter un coup d'oeil aux plafonniers.

Peut être un jour, la petite vis aura atteint une destination et ne sera plus là.
Tout comme la petite vieille que vous croisez chaque jour à la boulangerie, ou le chat, qui tous les après-midi d'été dort sur un balcon; un beau jour, vous remarquerez leurs absences mais leurs souvenirs s'attacheront à un certain endroit. Là, où il y aura toujours un petit coup d'oeil et une petite pensée pour eux.

Aucun commentaire: