lundi 21 juillet 2014

Cindy (8e partie)

« Qu'est-ce qu'on fout là ? »
Et nous revoila repartis pour la suite de Cindy 2002, le chef d'oeuvre de ce style hautement classieux et raffiné que l'on nomme la comédie-musicale.

Extrait : attention les yeux.
Ricky, le prince charmant qui aime faire gigoter son slip, commence l'audition afin de retrouver la mystérieuse fille ayant danser la gigue; jusqu'au bout on la subira cette gigue de m* !
Comme pour les 2/5 de la comédie musicale, nos tympans s'écrasent contre la répétition musicale de cette foutue gigue, où le sanglot long des violons est remplacé la douloureuse déchirure anale du clavier Yamaha.
Pour changer un peu, on nous place de jolis sons de derbouka et des choeur façon Roi lion.
Tout comme dans l'histoire de la vie, le rocker obsédé et son pote Rafiki manager son perchés au-dessus de la scène afin de contempler les danseurs qui gigotent.
Nous savions que les chorégraphies étaient d'une infâme horreur et que les costumes d'une infinie laideur mais nous voici devant une nouveauté. La scène étant constituée uniquement de danse pendant presque trois minutes, le réalisateur a pris le pari de rien nous montrer du tout. Nous n'avons que nos oreilles pour pleurer -et saigner- tellement on ne comprend rien.
On aperçoit même au fond Ricky et Rafiki faire les cons sur leur balcon; on ne voit voit même pas les cache-misères, c'est un comble.
Le montage fait plus pour la compréhension d'une crise d'épilepsie que celle de la chorégraphie. Nous voyons un plan toutes les secondes : champs, contre-champs, plongée, hors-champs, anxiété, vomissements. En plus de tout cela, certain mouvements sont au ralenti. Là où Peckinpah jouait avec l'individualité temporelle et la violence, le réalisateur de Cindy joue avec des mouvements chorégraphique moches et coupés en plein exécution.

Un peu de beauté dans ce monde d'horreur.
Puis, voilà qu'arrivent les deux belles-soeurs qui, comme nous l'avions vu dans l'article précédent, se débrouillent mieux en danse que Lâam mais qui seront renvoyées du casting.C'est alors que l'horrible violon synthétique se tu afin de laisser place à un flutiau et une harpe dégoulinants depuis les touches d'un beau synthétiseur de 1989. Le metteur en scène joue la carte beau et sobre avec juste deux lampions; peut être la seule scène du spectacle digne d'intérêt esthétique.
Soudain, tout s'arrête : voilà Cindy en train remuer lourdement avec sa salopette et ses deux pas de marelle. Inutile de préciser que le prince des derrières de Manchester accoure et lui redonne sa bague taiwanaise, souvenir d'une miraculeuse pêche aux canards à la fête à Neuneu.
Une lumière rose, une bague crachant du rose, les applaudissements polis du public, on souffle de désolation mais on se dit : "ah, mais ça veut dire que c'est la fin!"
Et non, il reste encore une heure de grand n'importe quoi (avant ce n'était rien).
La niaiseuse et le prince visiblement emballé.

Extrait musicale : attention aux paires.
Pendant que les deux tourtereaux s'enlacent, Judy, l'ancienne copine gothico-dépressive (pléonasme) de Ricky, arrive sur scène.
"Touche pas à l'homme qui m'appartient; je pourrai te casser les reins", le tout sur un xylophone digne du slow le plus moite des années 80 : on est tout de suite mis dans le bain.
Après toute la gamme des mots français rimant avec 'reins', la philosophe du Tranxen nous annonce - enfin nous crie : "Laisse-le moi, il est à moi; j'ai besoin de lui, il est ma seule survie." Voilà, le Cindy que l'on aime : à la fois réflexion profonde sur le genre et beauté poétique qui allie audace et élitisme des mots.

Sans un seul remords, Cindy lui balance en pleine gueule qu'elle n'est qu'une vieille chaussette mais de ne pas s'en faire car c'est le destin; ce à quoi Judy répond "je perds la partie". Une phrase choc soutenue par un merveilleux jeu d'acteur digne d'Aure Atika.
Oui, Cindy est méchante en plus d'être bête; si elle avait été un chien elle aurait été piqué depuis longtemps.
Elles entonnent ensemble "deux femmes qui aiment le même homme, c'est comme Caïn et Abel, David et Goliath". Il ne manque plus que Laurel et Hardy et Emile et Louis pour compléter le tableau.
L'auteur nous laisse dans le désert du désespoir intellectuel - surtout en faisant répéter quinze fois en dix lignes 'le même homme'- , Judy dans celui de la vilaine descente tonale sur le dernier mot et enfin tous les monde débarque pour faire la chenille sur la scène toujours aussi vide.
La mère de Cindy qui confirme que le père est un salaud (et/ou qu'elle est une professionnelle tarifée) : "jamais matin avec toi au côté de moi".
La belle-mère qui confirme que ce dernier était un sacré cochon : "tu as hanté ses nuits jusque dans mon lit".
L'auteur n'a tellement rien a dire sur ce sujet qu'au bout de trois couplets et encore moins de minutes, cette scène est expédiée. En même temps, c'est pas plus mal parce qu'en plus d'être soporifique, on s'en fout royalement.
Cindy : une histoire de paires.

Attention, voici le chef d'oeuvre de cette comédie musicale, la scène dite de la rave party!
Il faut voir que cette scène arrive au milieu de rien.
Je ne dirai que peu de chose et vous laisse apprécier pleinement ce grand moment : Rave party.
Quand on voit/entend cela, on se dit que l'on pourrait faire une comédie musicale sur l'achat d'un club-sandwich poulet/crudités à son Franprix.
Sujet sorti de nulle part, rimes affligeantes, morale de maternelle : que dire de plus si ce n'est que nous sommes en présence du chef d'oeuvre de ce spectacle ?
Un concentré de classe.

Extrait pour bien suivre : Quelle belle chanson.
Soudainement, après ce florilège d'épopée musicale et littéraire, le beat et les cuivres de Coeur de loup prennent la suite. Ensuite, mur rime quatre fois avec lui-même et on se décroche la mâchoire avec le fameux : "dur, dur, dur, de vivre contre un mur". Picoti picota, tape le mur et puis s'en va.
La belle soeur fan de rave party déclare encore une fois - comme si on avait pas compris/ comme si l'auteur était en manque d'inspiration - "laissez-moi vivre ma vie comme j'en ai envie".
On sent dans Cindy, cette qualité des années 80, surtout quand elle rajoute "il n'y a pas de mal à vouloir aimer la vie" qui résonne en nous comme un François Valéry remis au goût du jour.
Mais tout le projet spacio-temporel qu'est Cindy se trouve dans ses quelques lignes :
"Quand je sors dehors (on commence bien; bientôt on montera en-haut)
Toujours un mur qui marche à côté de moi (sûrement une métaphore mais étant un peu con je dis juste que les murs ne marchent pas).
Toujours ce mur, devant moi, derrière moi."
Franchement, comment voulez-vous que cela ne soit pas le bordel avec un mur qui est à côté, puis après à la fois devant et derrière ?
Bref, le belle-soeur n'arrête pas de bouger du bassin - vu son déguisement d'Ali Baba, on est dans le contexte- pendant que nos têtes frappent les murs, dur, dur, dur.
Un foutoir au niveau de l'espace et de sa perception, des métaphores recherchées, une opposition innovante entre mur/liberté et des rapprochements audacieux entre la vie et la nature, bref l'odyssée de Cindy à travers le bon goût ne baisse pas de niveau.
La suite très bientôt.

Qu'est-ce qu'on s'amuse !
                               Ps : vous remarquez comment en l'espace de dix minutes - à part pour le prince qui retrouve Cindy en 5 secondes - il ne s'est absolument rien passé ?


samedi 12 juillet 2014

"Le plus froid des monstres froids."


Aujourd'hui les enfants; le gentil professeur vanillé va vous expliquer pourquoi le fascisme ce n'est vraiment pas le top de la joie et la qualité de vie.
Non pas parce que de individus de type moustachu peuvent ordonner à ce que de gentils militaires avec leurs bottes toutes graisseuses viennent défoncer votre porte - et votre femme - à quatre heures du matin en beuglant en allemand; ni parce que l'état te dit sans se/te ménager que tu peux fermer ta gueule.
Non, mes amis, il y a bien pire que cela.

Le fascisme est un système ouvertement et abusivement bureaucratique. Il n'y a que ça : de la paperasse, de la paperasse et des noms pompeux. C'est pour cela que l'architecture de ces régimes est immense : faut ranger les dossiers (après c'est brut et moche parce qu'il n'y a plus de sous après que l'entrepreneur bétonneur soit passé).
Les voies de la vie citoyenne fasciste sont tout comme les couloirs des bunkers façon tours de Flak.

Imaginez donc un monde où vous serez entouré de pôle emploi, cpam, sncf, trésor public. Vous ne pourrez rien faire sans attendre des heures dans un couloir mal éclairé. Le couloir d'entrée à voie unique, comme si il n'y avait pas de sortie ou bien alors une sortie définitive comme l'animal que l'on conduit sans état d'âme vers la lame du boucher dans son étroit chemin de grilles.
Des heures pour vous confronter à la froideur de l'employé. Il vous répondra comme il tamponne vos feuilles : d'un coup sec et mécanique. Et ce sera comme ça pour tout ce qui concerne l'administration et l'état : c'est-à-dire tout ce qui se trouve en dehors de chez vous et de votre épicerie.
Et encore, c'est le style de gouvernements qui va tendre à te faire également de la paperasse pour te payer ton saucisson et tes lentilles avec de belles cartes de rationnement .

Non vraiment, j'espère que personne ne rêve d'un gouvernement fermement nationaliste et rigide...
En attendant, n'hésitez pas à commencer le bricolage; vous serez bien content de ressembler à Sarah Connor le moment venu (et en plus, vous pourrez me laisser votre numéro!).
Allez, Salucofagos et attention à ne pas trop forcer sur la tondeuse.

lundi 7 juillet 2014

Götterdämmerung (3/3)



Ainsi donc, c'est le bordel aux bords du Rhin; heureusement, on commence à être habitué.
Le mariage de Siegfried le drogué tourne mal quand sa véritable femme le reconnaît et dit à l'assemblée que même si la bigamie peut être acceptable dans certaines cultures, ce n'est pas le cas de sa morale; et qu'en plus elle a le numéro de maître Verges afin de faire reconnaître ses droits.
Tout comme les invités du mariage, nous savons tous que la mère Brünnhilde a une forte tendance à crier pour un oui ou pour un non, mais, avec le vin d'honneur qui avait déjà commencé - eh oui, on boit tôt et frais au bord du Rhin - les voix portent facilement. On lui apporte de l'eau mais rien n'y fait : elle gueule et gueule encore et encore à la manière du putois scandinave en rut.
Gâchant la plus belle des chenilles de la région, Hagen décide de lui parler à part en lui proposant une de ses fameuses crèmes glacées (non, ce n'est pas sexuel).

Hagen, qui n'est pas la dernière des enflures, lui propose directement d'assassiner son (ex?) mari. Un homme serviable comme on aimerait tant en connaître.
Tel un agent d'assurance, il lui dit que cette solution sera la plus belle chose de sa vie et en plus un acte militant et politique face à la dictature phallocrate. L'hystérique de service reconnaît que l'idée est plutôt intéressante, surtout qu'elle avait toujours aimé Simone de Beauvoir. Toutefois, Brünnhilde se demande tout de même si cela est bien sage; assassiner les gens pourquoi pas, mais autant le faire discrètement. Hagen - dit le renard du Gewurztraminer - avait tout prévu et lui dit qu'ils feront passer cela pour un accident. C'était tout de même encore un peu flou : tomber de l'escabeau, oublier de couper l'électricité avant de trifouiller le triphasé, glisser dans baignoire, c'est que le père Siegfried était quand même un bon gros gaillard qui n'allait pas expirer au premier fromage trop fermenté.
Heureusement, Brünnhilde dévoila la grand secret de son mariage : Siegfried à force de se pencher pour ramasser ses plants de marijuana souffrait de problèmes au dos. Ça tombait bien car les accidents de chasse dans le dos étaient la spécialité de la région depuis des générations.
Ainsi, un plan machiavélique se mit en place sur les bords du fleuve, entre une coupe de glace et quelques verres de vin.

Voici donc qu'arrive la partie de chasse qui ferme traditionnellement les mariages dans cette belle région viticole. Il est toujours plus sympa de battre la campagne en tirant sur tout ce qui bouge en ayant un coup dans le nez et/ou une bonne gueule de bois post-mariage. Bref, pendant que les loufiats nettoient les orgies, on met tout le monde dehors afin de dessaouler à l'air libre.
Siegfried avait une légère overdose de chips et Corbière et donc traînassait à l'arrière du groupe. Il s'assit au bord du fleuve pour cuver un peu. A peine avait-il fermé les yeux pour ronquer tranquille que des voix l'appelèrent.



C'était les trois petites souillons connues pour passer leur temps à nager à poil tout en essayant de satisfaire leurs besoins lubriques dès qu'un étranger se présentait vers elles. Pour notre hippy préféré, elles ne trémoussèrent pas le moindre bout charnu de chair; leur dernier jeu avec le nabot kleptomane et priapique avait dû leur suffire. D'ailleurs,elles ne s'étaient pas habillées - faut pas pousser - et de leurs voix charmeuses demandaient au jeune chevelu s'il pouvait leur rendre l'anneau qu'il portait sur lui.
Le jeune homme avait beau cuver et renier la société capitaliste ainsi que l'emprise matérielle et morale que les différentes autorités patriarcales et bourgeoises façonnaient, il n'était pas totalement fou et répondit qu'elles pouvaient aller se rhabiller (haha).
Les filles du Rhin n'avaient pas l'habitude de se voir refuser grand chose, ainsi, après avoir insulté Siegounet de "sale bâtard" et de "couilles molles" et lui prédirent que les 'enculés de bâtards comme lui allaient vite crever comme des chiens - et pas forcément dans une carrière' (dixit).

L'homme de la victoire et de la paix commençait à jeter des galets, voir des animaux morts, à la face des jeunes gourgandines quand celles-ci s'enfuir majeurs dressés et que la compagnie des joyeux chasseurs ivrognes arrivèrent.
Cors beuglant à tue-tête, testicules de sangliers en colliers et bites en avant, les hommes du château des Gibichungen avaient fière allure et faisaient honneur aux plus vaillants chasseurs du Vermandois.
Après une bonne tape dans le dos, le poto Hagen propose une bonne rasade de gouleyante vinasse au jeune héros. Vile traîtrise et vilenies ! Que mille pieux écorchent mon âme et percent ma vie ! Voilà que poussée par l'alcool et une potion de vérité, Siegfried commence à raconter sa vie. De ses premiers joints à sa médaille au concours de djembé de Groß -Gerau, tout y passait, mais c'est surtout le fait d'avoir épousé et consommé - dans le sens biblique, pas alimentaire - une jeune femme un peu gueularde et qui est désormais la maîtresse du château qui retint l'attention de tous nos chasseurs-cueilleurs de bières premier prix.
Sans attendre que la foule avinée s'échauffe un peu, Hagen crie au scandale tel un homme politique voyant son nom dans un article traitant de fausses factures. Il crie vite et surprend tout le monde en embrochant Siegfried dans le dos tel un rôtissier devant un cochon de lait.



Le corps de Siegfried est ramené au palais et chose étrange de la part du maléfique Hagen, le défunt porte toujours l'anneau au doigt. En gros, le type a fait le plus dur mais étant un peu neuneu - décidément, les simples d'esprit abondent dans la région - il a oublié de prendre l'anneau tant désiré.
Du coup, c'est le bordel - au sens figuré - au château : Gutrune chouine comme le Brahmapoutre à la saison des pluies; Brünnhilde se la joue Ophélie en rigolant et pleurant à la fois dans sa chambre et Günther essaye de gratter l'héritage en mode : "c'est mon pote, il voulait me le donner". Hagen, qui était pour des châtiments corporels allant crescendo, donna une baffe à sa soeur et la renvoya dans chambre et tua son frère à coups de chandelier dans la bibliothèque. Quand il entra dans la chambre de Brünnhilde avec sa décolleuse et son lance-clou, la corne de brume hystérique n'était plus là.
Il la retrouva près du bûcher funéraire de son mari - enfin, le premier -, une torche à la main.. Avant que le vilain bonhomme n'est pu faire quoi que ce soit, Brünnhilde met le feu au bûcher et fonce dedans avec son cheval; parce que c'est la classe.
 Le Rhin sort de son lit et mal réveillé il inonde toute la région; et Hagen le premier. Pendant ce temps, le feu du bûcher est monté jusqu'au Walhalla qui crame joyeusement.
Et c'est dans ce feu de joie que se conclut la saga wagnérienne.
Donc pour résumer : 12 heures de grand spectacle avec une fin bien cathartique où tout le monde crève, brûle, se noie et toutes ces joyeusetés.
Je dirais donc pour conclure : méfier vous des bijouteries et des bijoutiers.


Tout de même en cadeau, voici les plus belles pages musicales de la saga et le pourquoi j'adore ces 12 heures de spectacle :
1- Prélude de l'Acte 1 de Das Rheingold (le plus grand et beau poème visuel).
2- Descente de Wotan et Loge à Nibelheim.
3- La malediction de l'anneau.  (version Boulez/ Chéreau. Un chef d'oeuvre révolutionnaire et ce finale...)
4- Thor qui casse la baraque pour faire monter les dieux à Asgard.
5- Les adieux de Wotan (Ma partie préférée. Je pourrai payer 200e et voir 12h de spectacle rien que pour ce moment.)
6- Siegfred forgeant Notung.
7- Marche funèbre de Siegfried.