samedi 2 avril 2011

XIIIe arrondissement


Frédéric, 33 ans, est un peu schizophrène. Tout dans sa vie est double et opposé.
Frédéric est le fruit d'un amour alcoolisé entre un fils de bonne famille et une caissière de supermarché, ainsi son enfance s'est constituée autour d'aller-retours papa/maman, ville/campagne. Les noms de ses parents sonnaient pour lui comme des gares de banlieue; leurs compagnons respectifs étaient l'anonymat diffusé par les inaudibles haut-parleurs SNCF.
Maintenant, Frédéric travaille comme adjoint d'un député maire parisien et mène ce qui semble être une vie bien rangée : un bon boulot, une belle femme et un bel appartement du coté des Gobelins. Il était le parfait bobo parisien: propre sur lui, il aimait vivre dans cette partie bourgeoise du XIIIe mais adorait encore plus s'aventurer de quelques mètres dans le quartier chinois pour acheter des produits exotiques et pouvoir parader devant ses amis avec ses plats orientaux.
Enfin c'est au choix, si ils ne sont pas orientaux, ils sont bio.
Il aurait voulu vivre à la butte aux cailles: tellement plus à la mode, tellement moins vieux. Voir même vers la BNF, mais la proximité des chemins de fer et du périph' lui fait peur.
Sa femme est hôtesse de l'air sur des vols longs courriers ce qui laisse Frédéric seul chez lui avec son chat, le laissant s'adonner à ses plaisirs de bobo coupable: les émissions de déco, de cuisine ou bien les livres d'écrivain tâcherons dont les oeuvres s'arrachent à la Fnac ou à Leclerc (mais en poche car c'est moins cher).
C'est lors de ces jours de solitude que la vie de Frederic prend une autre forme. Après sa journée de travail, il quitte le coté vieux et bourgeois de son quartier et s'enfonce en-dessous de la place d'Italie, dans le quartier chinois.
A cause d'une erreur de jeunesse et d'un sombre chantage, Frédéric se retrouve la nuit à arpenter les salles de jeux clandestines, arrières-boutiques et cuisines de restau. Récupérer, transporter de l'argent et passer à tabac quelques personnes dans les dédales de ruelles sombres qui se glissent entre les immeubles. C'était la dette qu'il devait payer.
De jour, il se faisait maltraiter par les jeunes dealer de Tolbiac; de nuit c'est lui qui leur faisait cracher les intérêts.
Heureusement que les vieux bourgeois parisiens ne s'aventurent pas dans cette partie de l'arrondissement, mais Frédéric pensait déjà à sa couverture pour le moment où sa femme arrêtera de partir à l'autre bout du monde, car au final il commençait à aimer cela.

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