lundi 2 septembre 2024

Ma pauvre Rachel.


 

C'est la rentrée et le dormeur doit se réveiller, comme on dit chez Ducros. Et pour cela , rien de tel qu'un petit film un peu fermenté, voir faisandé, pour partir du bon pied.


La Momie 3, la tombe de l'empereur dragon (2008) vient clore une série de deux bons films d'aventure, dont le premier était un remake du classique de 1932 avec Boris Karloff.
Je vous laisse la bande-annonce ici (dont un ami plutôt porté par ce genre de films que sur du Jean Eustache m'a dit : "ça m'avait l'air déjà poussif à l'époque") pour que vous puissiez avoir un aperçu du bousin avant ce petit billet de bon aloi.

Est-ce que les acteurs jouent mal ? Disons le tout de suite, ce n'est pas une Masterclass de Daniel Day-lewis ou Joaquin Phoenix, mais ce n'est pas non plus celle d'Aure Atika ou Samuel le Bihan. En fait, le coeur du problème est qu'aucun personnage n'est bien écrit. Au-delà de la caricature, il n'y a aucun temps pour connaître/ développer/ s'attacher aux personnages.Ils ont même osé transformer le personnage un peu midinette joué par Rachel Weisz en une succube de chez Marc Dorcel. D'ailleurs, vu la profondeur des personnages (pas de jeu de mots), je me demande si les scénaristes ne viennent pas de ce milieu un peu olé olé.

Passons vite fait sur le scénario qui est aussi excitant qu'une serpillère tiédasse étalée un soir d'été sur le bord de la baignoire avec vu sur le périph.
Deux scénaristes sont crédités (c'est-à-dire 4 lobes de cervelle normalement) pour nous ressortir un remake du 2e film de la franchise avec de gros morceaux du 1er. Quasiment les mêmes scènes (le musée suivi de la course en voiture, le voyage rigolo en avion), l'interchangeable side-kick aviateur un peu lourd , le sbire maléfique insignifiant accompagnée de sa sous-fifre bonasse, la grosse baston numérique pendant le combat final et j'en passe..

On garde également les situations du genre "faisons vite sinon il/elle va mourir!" : dans le 2, nous avons le gamin en sursis pendant les 2/3 du film, et qui sera remplacé par sa mère à la fin. Dans cet opus, c'est papa Brendan (il ne restait plus grand monde sur la liste) qui se retrouve mourant au milieu du film. Un coup d'épée pernicieusement volante qui lui traverse le buffet à la place de celui de son fils. La tension est à son comble : le seul élément crédible du film commence à sentir le sapin.

Mais, sachez que le synonyme pour tension et suspens en langue Momie 3 est : paillasson. A peine 5 minutes plus tard, il est guéri avec toute l'émotion d'un pharmacien vendant une boîte de Doliprane 1000. Merci, au revoir Madame!

Si dans le 2, le fils avait un intérêt pour le développement de l'histoire et arrivait à ne pas être trop pénible (deux choses qu'Anakin dans l'épisode 1 n'avait pas coché), dans La tombe de machin dragon il est l'inutilité même. C'est un McGuffin, point barre. Le rôle est tellement vide que Dave Bautista ferait des merveilles. On ébauche l'image d'un jeune pur sang burné pour donner une histoire d'amour invisible et des répliques qui sonnent aussi juste que le film Predator doublé par Darry Cowl; et cette mèche à la Bo Craddock, pourquoi? 

Ensuite, on a le sbire (Anthony Wong surement perdu) traînant ses guêtres pour pas grand chose. Quasiment deux scènes au total et il crève comme la dernière des merdes. Là encore, aucune tension, aucun attachement. On dirait que même le décor ne ressent aucune émotion.
Sa seconde en chef, pourtant plutôt mise en évidence au début, n'apparaît dans une scène de plus de 10 secondes que pour mourir également à la manière d'un reste de bière dans une poubelle de Rock en Seine sous le soleil de 17h.


Parlons-en de ce stéréotype d'adjointe fatale du mal. Dans le 2, on avait une histoire, construite sur la rivalité entre elle et l'héroïne; ce qui relançait un peu l'intérêt du film plutôt que de juste nous ressortir la momie qu'il faut remettre au tombeau avec les mêmes persos. Ici, il n'y a rien. Juste rien. Personne ne sait qu'elle est là, personne ne l'appelle, personne ne la pleure. On ne connait même pas son nom, son rôle est bien aussi inutile que donner des noms aux chibres dans un glory-hole.

Et ce n'est pas isolé. En antagoniste, nous avons Jet Li. Son personnage (dont l'intro fait presque 1/5 du film) est un vilain qui contrôle les éléments et veut devenir immortel pour asservir le monde. OK, on a vu pire.
Le gars avec ses pouvoirs cosmiques phénoménaux ("dans un vrai mouchoir de poche") arrive à littéralement deux mètres de son but final et, tout d'un coup, un mec arrive au bout de la salle derrière lui et gueule : "bats-toi comme un homme!".  Et il le fait...
Bon, on devine qu'à la fin le bien l'emporte mais La Momie 3 sait surprendre! le combat dure 1 minute chrono. Avant de crever, toujours comme une 8.6 éventée dans un squat de Belleville, on assiste à un combat toujours sans tension, ni de mouvement impressionnant. Extrait pour votre culture : ici.

Et on en vient à l'autre problème : la réalisation.

On te vend de l'action et un peu de Wu xia pian avec Jet Li et Michelle Yeoh. Et puis, La momie 1 et 2, c'était de l'action plutôt simple mais bien travaillée.
One voit absolument rien. Les combats sont brouillons à tel point qu'ils en deviennent inutiles, en plus d'être moches.
Ca bouge dans tous les sens et le montage coupe toute chorégraphie. Mais je pense surtout qu'en fait il n'y a pas de chorégraphe et donc rien à filmer. En tout cas, pas plus que dans un téléfilm Hollywood Night.
En effet, on n'a pas beaucoup de combat donc ça sent le peinturlurage bon marché. Et dans le genre je bouge la caméra dans tous les sens pour masquer la pauvreté de la production, il suffit de voir les scènes d'action en voiture ou avion : rien ne bouge vraiment sauf la caméra qui a la gigitte façon delirium tremens.

Si l'on veut rester sur le sujet de la pauvreté, niveau humour, on en est aux glaçons sur les couilles et aux yacks qui vomissent. Je n'irais pas plus loin.

Les effets spéciaux ne sont pas de la première fraicheur; sans être horribles, ils font quand même moins bien que le premier sortit 10 ans auparavant (pour un budget de 80M$  - 98M pour le 2e - contre 145M pour le 3....). Où est passé l'argent, salauds!

La scène du musée est plutôt laide avec son cortège de chevaux maléfiques etc, mais heureusement arrivent après cela les yétis!
Les yétis mal fait ? Pas vraiment; si techniquement ça passe, leur design est tout autre. Les yétis sont donc des clones poilus de The Rock croisé avec le chat Catsan avec pour modèle les yétis de Tomb Raider II. Ainsi, ils n'ont pas vraiment une gueule de porte bonheur mais surtout, ils fuient face aux ultrasons; car oui, Jet Li maîtrise les éléments mais le feu coûte cher donc, contre les yétis, il beugle en mode Farinelli et hop, retour chez Lio pour les yétis (ou dans celui-là pour les plus classieux).

A la fin, on a le droit à l'armée d'Anubis du 2 versus les morts de Dunharrow. Ce n'est pas encore trop moche mais qu'est-ce qu'on s'en fout! Le scénario et le réalistaur également, rassurez-vous.
A propos d'armée des morts, les deux dialoguistes pillent resucent sans finesse les gags d'Evil Dead 3.

Voilà.
Ce film est donc un film dont on ne retient rien car il est tel le vent venant du large : on ne sait pas d'où il vient, on ne sait pas où il va et il sent un peu la marée.
Au moins, ça va vite et on peut retenir un décor de rue de Shanghai plutôt jolie et un beau plan de la chaîne Himalayenne.

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