dimanche 24 novembre 2013

Chapitre 14 : La boîte à Moujiks



Quand Jack Médecin rouvrit les yeux, le fait d'être allongé dans un somptueux lit à baldaquin ne le surprit nullement; le fait d'avoir mal au crâne par contre beaucoup plus.
De part ses hautes études ès cuites, Jack ne connaissait plus les douleurs matinales de la boîte crânienne. Sa tête résistait parfaitement aux assauts de litres d'alcool, mais n'avait aucun moyen de lutter contre des bottines de cuir taille 44.
Dans la pièce, une grande cheminée où somnolait une bûche embrasée se présentait à l'extrémité de la pièce. Au-dessus du manteau, il y avait un grand tableau.
Toute la pièce était faite de gros blocs de pierre grise. Jack se rappelait la fois où il avait été voir le Dracula de Coppola au cinéma avec sa petite-amie de l'époque. Il se souvenait surtout de l'obscurité et de la tranquillité de la salle de banlieue, permettant ainsi pelotage et galochage, mais tout de même quelques scènes lui revenaient en tête ; et pas que celles un peu dénudées.

Au-delà de la fenêtre, le vide et la fureur. Les murs plongeaient droit vers une côte rocheuse déchiquetée battue par l'écume et le vent. Il n'y avait rien à faire, ça n'allait pas être pas là que notre Jack allait s'échapper.
Au-delà de la grosse porte faite de fer et de bois - enfin, cela avait tellement l'air épais que l'on aurait dit que la porte était constituée de souches liées par une mine de plomb - des craquements de planchers se firent entendre.

Krasucki entra accompagné de deux gardes armés. Maintenant il revoyait d'Indiana Jones et le dernière croisade, mais sans la bonnasse blonde.
Sans un mot, Krazu lui asséna un coup de crosse. Quasi-inconscient pour quelques dizaines de secondes, Jack ne recouvrit pleinement ses esprits que pieds et poings liés sur une belle chaise rustique. Ni lui, ni Krazu et ses deux amis mono-faciaux n'avaient quitté la pièce.

- Alors Jack, toujours dans les coups fourrés ?
- Dans les fourrés tu veux dire.

Une mandale ne se fit pas attendre. Décidément, les nazis d'Indiana n'étaient pas loin.

-La dernière fois, c'était y'a quoi : 15 ans ? Tu as quitté le gang comme ça sans vraiment nous prévenir; on te connaissait solitaire mais tout de même... Même pas un petit texto d'adieu.
- J'avais laissé mon sac banane à l'appart; vous ne l'auriez pas fait exploser vous auriez eu un beau roman d'amour à insultes.

Deuxième mandale; les coups attendrissent la viande mais Jack, même en tant que Saint patron des carnivores, ne comptait pas se manger soi-même.
Redoutant de devoir se repayer un nouveau bridge sur sa deuxième prémolaire gauche, notre héros demeura silencieux.
Les deux gardes sur les ordres de Krazu arrêtèrent de faire figuration et accompagnèrent Jack toujours attaché comme le dernier des bagnards texans.
Arrivé devant une sorte de puits creusé dans le sol, au bout d'un couloir, Jack s'arrêta, se retourna et finalement se résigna à appeler un dentiste pour remplacer son bridge perdu alors qu'il tombait à travers les puits.
La chute fut rude mais la reprise de conscience également : Jack se trouvait dans une petite arène. Sur les gradins la surplombant, Krazu était entouré de plusieurs dizaines de personnes. Jack avait du public et il allait pouvoir faire son show. Par contre, si son adversaire était l'espèce de sanglier géant qui broutait à l'autre bout, le show allait être quelque chose. Jack n'avait jamais autant rêvé d'être un Obélix des temps modernes..

(A suivre)

Aucun commentaire: