mercredi 5 novembre 2014

XVIe arrondissement


La journée avait été longue pour Mélissa. Ses jambes lourdes pénétraient le sol de la rame au rythme du rail.
Le train s'élève au dessus de la monotonie sombre et crasseuse du cœur de la ville. En contrebas une station reste collée au souterrain. Mélissa espérait déboucher sur l'air libre, en une soudaine explosion de lumière. Un rollercoaster du pauvre et du quotidien mais le rêve était à l'image du parc d'attraction : l'engin ne débarqua que sur un quai aux lumières jaunâtres et à l'horizon bas et aussi gris que les costumes des cols blancs s'amassant devant les portes griffées.
C'est à la station suivante que la jeune fille de vingt-six ans se faufila vers la sortie. Il lui fallu parcourir des mètres de catacombes modernes avant de n'avoir que le ciel hivernal au-dessus de la tête. Une pluie fine se déposait sur ses cheveux et ce n'est qu'à la lumière des lampadaires qu'elle découvrit ce nouveau monde.
Des rues sans réels magasins, des rues où de hauts immeubles fiers et glacés aspirent la moelle de la cité. Des ombres courbées se faufilaient devant ses yeux.
Des vieux; une armée de vieux. Les forces spéciales des déambulateurs, les gradès de la rombière emperlousée, la légion du Chihuahua à demi-crevé.
D'après le plan affiché dans les couloirs du métro, elle devait se rendre de l'autre côté du carrefour vers de hauts murs d'où seuls quelques branchages dépassaient. Le carrefour était aussi grand et moche que tous les autres mais malgré les feux de réglementation il semblait représenter une zone de non-droit.
Mélissa avait vaincu le far-west et ses hordes barbares, maintenant sa destination était à portée de vue.
La lourde porte surveillée par deux cariatides s'ouvrit péniblement. Une dame qui la croisa dans le couloir la salua poliment avant de disparaître. Les pas de la jeune fille résonnaient contre les murs marbrés alors que sa propre silhouette l'accompagnait le long du mur couvert de miroirs.
La cage qui portait le nom d'ascenseur était en panne. Déjà d'humeur morose, Mélissa sentait sombrer son esprit pendant que ses chaussures s'enfonçaient inexorablement dans l'épaisse moquette rouge.
Six étages et autant de demi-paliers plus tard, elle se tenait enfin devant la grande porte olivâtre.
Elle sonna et attendit. Elle pouvait entendre le chat courir dans l'appartement pendant qu'elle réajustait sa coiffure et son chemisier.
La porte s'ouvrit doucement et la vieille dame lui sourit comme à son habitude.

lundi 13 octobre 2014

A la bougie.



Au balcon.


Aujourd'hui, une hirondelle
Sur ma fenêtre et mes soucis
S'est posée.
Elle n'eut fait que de me guigner;
Je n'eus le temps de lui demander.
A tire-d'aile, elle s'était envolée.


Devanture.

L'autre nuit, je t'ai vue devant le Franprix,
Tu étais belle et radieuse, j'étais saoul et en chaleur;
J'avais toute la nuit, heureusement tu n'es pas chère de l'heure.
Ma bonne Monique, tu es la seule dans Paris
Qui propose ses jambons entre des légumes en cagettes,
Cela fait toujours du bien d'avoir du vert avec sa paupiette.


Discount.

J'étais seul, j'étais abandonné.
Perdu au rayon DVD,
Quand, tout à coup, une jaquette m'a frappé.
Chuck Norris, y'a pas à dire, tu m'as violemment sauvé.



Embarcadère.

A chaque lettre envoyée, je plante pour toi,
Face à l'horizon bleuté, des graines de freesia.
Du rivage, leur clarté luit au-dessus des marées.
Malgré les saisons, aucune ne s'est encore fanée,
Et c'est depuis leur promontoire côtier
Que chaque jour, elles te rappellent à moi.
Une nuit, dans les embruns, je n'entendrai plus ta voix
Mais de la sombre barque, je fixerai ton visage enjoué.


Glockenspiel.

Je frappe à ta porte comme ton mari sur ton nez.
Rien sinon le sourd écho de ma chair contre la paroi.
Vide et immobile tel un cassoulet mal réchauffé,
Je ne cherche même pas à revenir sur mes pas.
Je me fonds dans ce couloir mal éclairé;
Mon front collé à ce rendez-vous manqué.
C'est au sein de cette hideuse moquette murale
Que, peu à peu, ton visage se dévoile.
De toute part, ton regard me braque
Et ce vieux bâtiment dévoile de ses portes un rire démoniaque.
Cet immeuble est vraiment dégueulasse,
Bon à être prestement démoli, comme ta face.

lundi 22 septembre 2014

Ouvre-déboîtier.



En ce moment, le dénouement d'une longue affaire arrive à sont terme : celui de la mention "fait maison" portée sur les menus des restaurateurs. Enfin, c'est ce que l'on dit car depuis le temps qu'on en parle les surgelés se vendent désormais en euros.

Est-ce vraiment choquant que des restaurateurs se fournissent chez Métro? Surgelé ou non, cela reste une facilité d'achat. C'est comme préparer un repas pour des amis en se fournissant chez son commerçant, soit chez son Franprix.
Il y a une différence entre acheter son plat entièrement congelé et des ingrédients également congelés qui seront par la suite cuisiné par le chef ? Gardons à l'esprit que pour certains serial killers, une prostituée même découpée en morceaux reste une prostituée sexuellement valable.

Le problème tient surtout dans la fausseté de tous sur le sujet.
Celles de clients qui ne disent rien mais surtout celle des restaurateurs profitant de la loi qui interdit aux clients de balancer les plats à la gueule du tenancier, de pisser sur les tables, de violer sauvagement la patronne sur la caisse enregistreuse et de brûler la cuisine dans un mouvement, certes excessif mais tellement naturel, de protestation.
Qui a envie de payer 10 euros pour une moussaka infâme dont déjà on n'en voudrait pas pour 3 euros à Franprix?
C'est comme le prix des consommations; pourquoi il y a tant de monde dans certains coins de Paris (même ceux où il n'y a rien) où l'on peut joyeusement cracher 8 euros pour un demi de Kronenbourg fleurant bon l'eau aromatisée et une future diarrhée?
L'argent joue un rôle. Se payer de la saloperie pour un prix royal devient une marque de réussite sociale, d'ailleurs il est de notoriété publique que les nouveaux riches ont un goût tout à fait atroce. La gorgée de Villageoise à cinq euros le verre se savoure. Elle devient délicieuse et coule langoureusement sur le palais comme un billet de cinquante euros sur la cuisse d'une jeune strip-teaseuse praguoise. Pour le prix, on ne va pas commencer à regarder les finitions mais plutôt à devenir chercheur en bonnes surprises (et très souvent en surprises tout court).

J'ose espérer que les crêperies font eux-mêmes leur pâtes à crêpes parce que c'est sûrement le type de restaurant qui se fout le plus ouvertement de ta gueule quand on voit le prix de pâte cuite avec une tranche de jambon et du gruyère.

Non, soyons honnête avec nous-mêmes! Respectons-nous un tant soit peu.
N'oublions jamais que le vrai plaisir se trouve dans la bibine et que quel que soit le restaurant où l'on va, les margoulins viendront toujours te proposer une stimulation prostatique avec le prix de leurs bouteilles.
Mais on ne va quand même pas arrêter de picoler et d'aller se prendre un ptit plat à la brasserie du coin le midi.


lundi 21 juillet 2014

Cindy (8e partie)

« Qu'est-ce qu'on fout là ? »
Et nous revoila repartis pour la suite de Cindy 2002, le chef d'oeuvre de ce style hautement classieux et raffiné que l'on nomme la comédie-musicale.

Extrait : attention les yeux.
Ricky, le prince charmant qui aime faire gigoter son slip, commence l'audition afin de retrouver la mystérieuse fille ayant danser la gigue; jusqu'au bout on la subira cette gigue de m* !
Comme pour les 2/5 de la comédie musicale, nos tympans s'écrasent contre la répétition musicale de cette foutue gigue, où le sanglot long des violons est remplacé la douloureuse déchirure anale du clavier Yamaha.
Pour changer un peu, on nous place de jolis sons de derbouka et des choeur façon Roi lion.
Tout comme dans l'histoire de la vie, le rocker obsédé et son pote Rafiki manager son perchés au-dessus de la scène afin de contempler les danseurs qui gigotent.
Nous savions que les chorégraphies étaient d'une infâme horreur et que les costumes d'une infinie laideur mais nous voici devant une nouveauté. La scène étant constituée uniquement de danse pendant presque trois minutes, le réalisateur a pris le pari de rien nous montrer du tout. Nous n'avons que nos oreilles pour pleurer -et saigner- tellement on ne comprend rien.
On aperçoit même au fond Ricky et Rafiki faire les cons sur leur balcon; on ne voit voit même pas les cache-misères, c'est un comble.
Le montage fait plus pour la compréhension d'une crise d'épilepsie que celle de la chorégraphie. Nous voyons un plan toutes les secondes : champs, contre-champs, plongée, hors-champs, anxiété, vomissements. En plus de tout cela, certain mouvements sont au ralenti. Là où Peckinpah jouait avec l'individualité temporelle et la violence, le réalisateur de Cindy joue avec des mouvements chorégraphique moches et coupés en plein exécution.

Un peu de beauté dans ce monde d'horreur.
Puis, voilà qu'arrivent les deux belles-soeurs qui, comme nous l'avions vu dans l'article précédent, se débrouillent mieux en danse que Lâam mais qui seront renvoyées du casting.C'est alors que l'horrible violon synthétique se tu afin de laisser place à un flutiau et une harpe dégoulinants depuis les touches d'un beau synthétiseur de 1989. Le metteur en scène joue la carte beau et sobre avec juste deux lampions; peut être la seule scène du spectacle digne d'intérêt esthétique.
Soudain, tout s'arrête : voilà Cindy en train remuer lourdement avec sa salopette et ses deux pas de marelle. Inutile de préciser que le prince des derrières de Manchester accoure et lui redonne sa bague taiwanaise, souvenir d'une miraculeuse pêche aux canards à la fête à Neuneu.
Une lumière rose, une bague crachant du rose, les applaudissements polis du public, on souffle de désolation mais on se dit : "ah, mais ça veut dire que c'est la fin!"
Et non, il reste encore une heure de grand n'importe quoi (avant ce n'était rien).
La niaiseuse et le prince visiblement emballé.

Extrait musicale : attention aux paires.
Pendant que les deux tourtereaux s'enlacent, Judy, l'ancienne copine gothico-dépressive (pléonasme) de Ricky, arrive sur scène.
"Touche pas à l'homme qui m'appartient; je pourrai te casser les reins", le tout sur un xylophone digne du slow le plus moite des années 80 : on est tout de suite mis dans le bain.
Après toute la gamme des mots français rimant avec 'reins', la philosophe du Tranxen nous annonce - enfin nous crie : "Laisse-le moi, il est à moi; j'ai besoin de lui, il est ma seule survie." Voilà, le Cindy que l'on aime : à la fois réflexion profonde sur le genre et beauté poétique qui allie audace et élitisme des mots.

Sans un seul remords, Cindy lui balance en pleine gueule qu'elle n'est qu'une vieille chaussette mais de ne pas s'en faire car c'est le destin; ce à quoi Judy répond "je perds la partie". Une phrase choc soutenue par un merveilleux jeu d'acteur digne d'Aure Atika.
Oui, Cindy est méchante en plus d'être bête; si elle avait été un chien elle aurait été piqué depuis longtemps.
Elles entonnent ensemble "deux femmes qui aiment le même homme, c'est comme Caïn et Abel, David et Goliath". Il ne manque plus que Laurel et Hardy et Emile et Louis pour compléter le tableau.
L'auteur nous laisse dans le désert du désespoir intellectuel - surtout en faisant répéter quinze fois en dix lignes 'le même homme'- , Judy dans celui de la vilaine descente tonale sur le dernier mot et enfin tous les monde débarque pour faire la chenille sur la scène toujours aussi vide.
La mère de Cindy qui confirme que le père est un salaud (et/ou qu'elle est une professionnelle tarifée) : "jamais matin avec toi au côté de moi".
La belle-mère qui confirme que ce dernier était un sacré cochon : "tu as hanté ses nuits jusque dans mon lit".
L'auteur n'a tellement rien a dire sur ce sujet qu'au bout de trois couplets et encore moins de minutes, cette scène est expédiée. En même temps, c'est pas plus mal parce qu'en plus d'être soporifique, on s'en fout royalement.
Cindy : une histoire de paires.

Attention, voici le chef d'oeuvre de cette comédie musicale, la scène dite de la rave party!
Il faut voir que cette scène arrive au milieu de rien.
Je ne dirai que peu de chose et vous laisse apprécier pleinement ce grand moment : Rave party.
Quand on voit/entend cela, on se dit que l'on pourrait faire une comédie musicale sur l'achat d'un club-sandwich poulet/crudités à son Franprix.
Sujet sorti de nulle part, rimes affligeantes, morale de maternelle : que dire de plus si ce n'est que nous sommes en présence du chef d'oeuvre de ce spectacle ?
Un concentré de classe.

Extrait pour bien suivre : Quelle belle chanson.
Soudainement, après ce florilège d'épopée musicale et littéraire, le beat et les cuivres de Coeur de loup prennent la suite. Ensuite, mur rime quatre fois avec lui-même et on se décroche la mâchoire avec le fameux : "dur, dur, dur, de vivre contre un mur". Picoti picota, tape le mur et puis s'en va.
La belle soeur fan de rave party déclare encore une fois - comme si on avait pas compris/ comme si l'auteur était en manque d'inspiration - "laissez-moi vivre ma vie comme j'en ai envie".
On sent dans Cindy, cette qualité des années 80, surtout quand elle rajoute "il n'y a pas de mal à vouloir aimer la vie" qui résonne en nous comme un François Valéry remis au goût du jour.
Mais tout le projet spacio-temporel qu'est Cindy se trouve dans ses quelques lignes :
"Quand je sors dehors (on commence bien; bientôt on montera en-haut)
Toujours un mur qui marche à côté de moi (sûrement une métaphore mais étant un peu con je dis juste que les murs ne marchent pas).
Toujours ce mur, devant moi, derrière moi."
Franchement, comment voulez-vous que cela ne soit pas le bordel avec un mur qui est à côté, puis après à la fois devant et derrière ?
Bref, le belle-soeur n'arrête pas de bouger du bassin - vu son déguisement d'Ali Baba, on est dans le contexte- pendant que nos têtes frappent les murs, dur, dur, dur.
Un foutoir au niveau de l'espace et de sa perception, des métaphores recherchées, une opposition innovante entre mur/liberté et des rapprochements audacieux entre la vie et la nature, bref l'odyssée de Cindy à travers le bon goût ne baisse pas de niveau.
La suite très bientôt.

Qu'est-ce qu'on s'amuse !
                               Ps : vous remarquez comment en l'espace de dix minutes - à part pour le prince qui retrouve Cindy en 5 secondes - il ne s'est absolument rien passé ?


samedi 12 juillet 2014

"Le plus froid des monstres froids."


Aujourd'hui les enfants; le gentil professeur vanillé va vous expliquer pourquoi le fascisme ce n'est vraiment pas le top de la joie et la qualité de vie.
Non pas parce que de individus de type moustachu peuvent ordonner à ce que de gentils militaires avec leurs bottes toutes graisseuses viennent défoncer votre porte - et votre femme - à quatre heures du matin en beuglant en allemand; ni parce que l'état te dit sans se/te ménager que tu peux fermer ta gueule.
Non, mes amis, il y a bien pire que cela.

Le fascisme est un système ouvertement et abusivement bureaucratique. Il n'y a que ça : de la paperasse, de la paperasse et des noms pompeux. C'est pour cela que l'architecture de ces régimes est immense : faut ranger les dossiers (après c'est brut et moche parce qu'il n'y a plus de sous après que l'entrepreneur bétonneur soit passé).
Les voies de la vie citoyenne fasciste sont tout comme les couloirs des bunkers façon tours de Flak.

Imaginez donc un monde où vous serez entouré de pôle emploi, cpam, sncf, trésor public. Vous ne pourrez rien faire sans attendre des heures dans un couloir mal éclairé. Le couloir d'entrée à voie unique, comme si il n'y avait pas de sortie ou bien alors une sortie définitive comme l'animal que l'on conduit sans état d'âme vers la lame du boucher dans son étroit chemin de grilles.
Des heures pour vous confronter à la froideur de l'employé. Il vous répondra comme il tamponne vos feuilles : d'un coup sec et mécanique. Et ce sera comme ça pour tout ce qui concerne l'administration et l'état : c'est-à-dire tout ce qui se trouve en dehors de chez vous et de votre épicerie.
Et encore, c'est le style de gouvernements qui va tendre à te faire également de la paperasse pour te payer ton saucisson et tes lentilles avec de belles cartes de rationnement .

Non vraiment, j'espère que personne ne rêve d'un gouvernement fermement nationaliste et rigide...
En attendant, n'hésitez pas à commencer le bricolage; vous serez bien content de ressembler à Sarah Connor le moment venu (et en plus, vous pourrez me laisser votre numéro!).
Allez, Salucofagos et attention à ne pas trop forcer sur la tondeuse.

lundi 7 juillet 2014

Götterdämmerung (3/3)



Ainsi donc, c'est le bordel aux bords du Rhin; heureusement, on commence à être habitué.
Le mariage de Siegfried le drogué tourne mal quand sa véritable femme le reconnaît et dit à l'assemblée que même si la bigamie peut être acceptable dans certaines cultures, ce n'est pas le cas de sa morale; et qu'en plus elle a le numéro de maître Verges afin de faire reconnaître ses droits.
Tout comme les invités du mariage, nous savons tous que la mère Brünnhilde a une forte tendance à crier pour un oui ou pour un non, mais, avec le vin d'honneur qui avait déjà commencé - eh oui, on boit tôt et frais au bord du Rhin - les voix portent facilement. On lui apporte de l'eau mais rien n'y fait : elle gueule et gueule encore et encore à la manière du putois scandinave en rut.
Gâchant la plus belle des chenilles de la région, Hagen décide de lui parler à part en lui proposant une de ses fameuses crèmes glacées (non, ce n'est pas sexuel).

Hagen, qui n'est pas la dernière des enflures, lui propose directement d'assassiner son (ex?) mari. Un homme serviable comme on aimerait tant en connaître.
Tel un agent d'assurance, il lui dit que cette solution sera la plus belle chose de sa vie et en plus un acte militant et politique face à la dictature phallocrate. L'hystérique de service reconnaît que l'idée est plutôt intéressante, surtout qu'elle avait toujours aimé Simone de Beauvoir. Toutefois, Brünnhilde se demande tout de même si cela est bien sage; assassiner les gens pourquoi pas, mais autant le faire discrètement. Hagen - dit le renard du Gewurztraminer - avait tout prévu et lui dit qu'ils feront passer cela pour un accident. C'était tout de même encore un peu flou : tomber de l'escabeau, oublier de couper l'électricité avant de trifouiller le triphasé, glisser dans baignoire, c'est que le père Siegfried était quand même un bon gros gaillard qui n'allait pas expirer au premier fromage trop fermenté.
Heureusement, Brünnhilde dévoila la grand secret de son mariage : Siegfried à force de se pencher pour ramasser ses plants de marijuana souffrait de problèmes au dos. Ça tombait bien car les accidents de chasse dans le dos étaient la spécialité de la région depuis des générations.
Ainsi, un plan machiavélique se mit en place sur les bords du fleuve, entre une coupe de glace et quelques verres de vin.

Voici donc qu'arrive la partie de chasse qui ferme traditionnellement les mariages dans cette belle région viticole. Il est toujours plus sympa de battre la campagne en tirant sur tout ce qui bouge en ayant un coup dans le nez et/ou une bonne gueule de bois post-mariage. Bref, pendant que les loufiats nettoient les orgies, on met tout le monde dehors afin de dessaouler à l'air libre.
Siegfried avait une légère overdose de chips et Corbière et donc traînassait à l'arrière du groupe. Il s'assit au bord du fleuve pour cuver un peu. A peine avait-il fermé les yeux pour ronquer tranquille que des voix l'appelèrent.



C'était les trois petites souillons connues pour passer leur temps à nager à poil tout en essayant de satisfaire leurs besoins lubriques dès qu'un étranger se présentait vers elles. Pour notre hippy préféré, elles ne trémoussèrent pas le moindre bout charnu de chair; leur dernier jeu avec le nabot kleptomane et priapique avait dû leur suffire. D'ailleurs,elles ne s'étaient pas habillées - faut pas pousser - et de leurs voix charmeuses demandaient au jeune chevelu s'il pouvait leur rendre l'anneau qu'il portait sur lui.
Le jeune homme avait beau cuver et renier la société capitaliste ainsi que l'emprise matérielle et morale que les différentes autorités patriarcales et bourgeoises façonnaient, il n'était pas totalement fou et répondit qu'elles pouvaient aller se rhabiller (haha).
Les filles du Rhin n'avaient pas l'habitude de se voir refuser grand chose, ainsi, après avoir insulté Siegounet de "sale bâtard" et de "couilles molles" et lui prédirent que les 'enculés de bâtards comme lui allaient vite crever comme des chiens - et pas forcément dans une carrière' (dixit).

L'homme de la victoire et de la paix commençait à jeter des galets, voir des animaux morts, à la face des jeunes gourgandines quand celles-ci s'enfuir majeurs dressés et que la compagnie des joyeux chasseurs ivrognes arrivèrent.
Cors beuglant à tue-tête, testicules de sangliers en colliers et bites en avant, les hommes du château des Gibichungen avaient fière allure et faisaient honneur aux plus vaillants chasseurs du Vermandois.
Après une bonne tape dans le dos, le poto Hagen propose une bonne rasade de gouleyante vinasse au jeune héros. Vile traîtrise et vilenies ! Que mille pieux écorchent mon âme et percent ma vie ! Voilà que poussée par l'alcool et une potion de vérité, Siegfried commence à raconter sa vie. De ses premiers joints à sa médaille au concours de djembé de Groß -Gerau, tout y passait, mais c'est surtout le fait d'avoir épousé et consommé - dans le sens biblique, pas alimentaire - une jeune femme un peu gueularde et qui est désormais la maîtresse du château qui retint l'attention de tous nos chasseurs-cueilleurs de bières premier prix.
Sans attendre que la foule avinée s'échauffe un peu, Hagen crie au scandale tel un homme politique voyant son nom dans un article traitant de fausses factures. Il crie vite et surprend tout le monde en embrochant Siegfried dans le dos tel un rôtissier devant un cochon de lait.



Le corps de Siegfried est ramené au palais et chose étrange de la part du maléfique Hagen, le défunt porte toujours l'anneau au doigt. En gros, le type a fait le plus dur mais étant un peu neuneu - décidément, les simples d'esprit abondent dans la région - il a oublié de prendre l'anneau tant désiré.
Du coup, c'est le bordel - au sens figuré - au château : Gutrune chouine comme le Brahmapoutre à la saison des pluies; Brünnhilde se la joue Ophélie en rigolant et pleurant à la fois dans sa chambre et Günther essaye de gratter l'héritage en mode : "c'est mon pote, il voulait me le donner". Hagen, qui était pour des châtiments corporels allant crescendo, donna une baffe à sa soeur et la renvoya dans chambre et tua son frère à coups de chandelier dans la bibliothèque. Quand il entra dans la chambre de Brünnhilde avec sa décolleuse et son lance-clou, la corne de brume hystérique n'était plus là.
Il la retrouva près du bûcher funéraire de son mari - enfin, le premier -, une torche à la main.. Avant que le vilain bonhomme n'est pu faire quoi que ce soit, Brünnhilde met le feu au bûcher et fonce dedans avec son cheval; parce que c'est la classe.
 Le Rhin sort de son lit et mal réveillé il inonde toute la région; et Hagen le premier. Pendant ce temps, le feu du bûcher est monté jusqu'au Walhalla qui crame joyeusement.
Et c'est dans ce feu de joie que se conclut la saga wagnérienne.
Donc pour résumer : 12 heures de grand spectacle avec une fin bien cathartique où tout le monde crève, brûle, se noie et toutes ces joyeusetés.
Je dirais donc pour conclure : méfier vous des bijouteries et des bijoutiers.


Tout de même en cadeau, voici les plus belles pages musicales de la saga et le pourquoi j'adore ces 12 heures de spectacle :
1- Prélude de l'Acte 1 de Das Rheingold (le plus grand et beau poème visuel).
2- Descente de Wotan et Loge à Nibelheim.
3- La malediction de l'anneau.  (version Boulez/ Chéreau. Un chef d'oeuvre révolutionnaire et ce finale...)
4- Thor qui casse la baraque pour faire monter les dieux à Asgard.
5- Les adieux de Wotan (Ma partie préférée. Je pourrai payer 200e et voir 12h de spectacle rien que pour ce moment.)
6- Siegfred forgeant Notung.
7- Marche funèbre de Siegfried.

lundi 23 juin 2014

Camping paradis au beurre salé.



Bientôt les soldes d'été, déjà l'époque d'un rosé bien frais en terrasse et presque le début des flirts de camping avec le G.O. qui nettoie la piscine et ne rêve que de vous entre les douches communes et la baraque à frites.
Associons donc soldes et amours en ce presque solstice d'été.


Les relations amoureuses sont comme les vêtements. Certains vont chez Kiloshop et d'autres s'offrent du sur-mesure à des prix exorbitants (non, je ne parle pas du monde de la nuit et des escorts).
Même de grandes figures de l'amour racé et passionnel, comme Barbe-Bleue, confondaient amours et vêtements en rangeant leurs femmes dans leurs dressings. Bien sûr, je suis pour l'égalité des sexes et la même s'applique aux femmes - bien qu'elles préfèrent mettre les hommes dans les placards.
Mais sans parler de ses personnes possessives et légèrement cintrées qui remplissent leurs penderies, le simple lèche-vitrine confirme cette étude qui va, sans nul doute, révolutionner la page 43 du Figaro Madame du mois prochain.


Les gens qui ont de l'argent - les vrais, les emperlousés - ne regardent pas les vitrines H&M. Seuls ceux qui ont des moyens H&M regardent ces dernières. Dans cette catégorie, il faut voir qu'il y a ce que l'on appelle les gourmets de la confection à la presse hydraulique chinoise; sentant en eux un destin exceptionnel, ces derniers privilégient les boutiques interlopes aux noms sentant bon le rêve américain des zones industrielles provinciales : Mario confection, José chaussures ou bien encore Sergio Cicci mode 86. Ces magasins sont à la mode ce qu'un dealer ou un tenancier d'hôtel borgne sont au romantisme : une relation pleine d'aventures qui s'évanouira aussi vite qu'un magasin devant une fraude à l'assurance incendie.
Je ne fais pas de pub mais comme je sens que vous souhaitez bien rigoler avec ce sujet, voici un petit cadeau pour vous, mes loulous : 
Une publicité, une vraie.

Après, il y a toujours ceux qui regardent les vitrines des magasins de luxe. La beauté d'un vêtement Kenzo, la coupe d'une costume Hugo Boss ou bien encore la légèreté d'un chemisier Givenchy, tous ces produits exposés aux clients comme à ceux qui rêvent vainement de pouvoir un jour ressortir du magasin avec (enfin sans courir et se voir exposé à affronter les forces de l'ordre et de la justice). Un étalage indécent qui ferait passer internet pour un dépliant protestant sur le bonheur et la sexualité. En plus avec ce bel été qui arrive (c'est pour la formule), les muscles et les lignes galbées s'étalent telles les pages régimes d'un magazine féminin, du coup la vie devient une immense vitrine au contenu chatoyant mais lointain ( ça doit être Victor Hugo 2014 avec son crépuscule, son brin d'herbe et sa tombe qui m'inspirent).




Et puis, il y a ceux qui ont tout simplement mauvais goût. Si culinairement ce genre prolifère dans les établissements 'buffet à volonté', ils sont plus difficile à cerner vestimentairement parlant. Ils vivotent entre différentes boutiques allant des friperies aux enseignes sportives coincées entre La halle aux chaussures et Jean Vautroux, piscine de père en fils. Dans tous les cas, le mauvais goût se caractérise par la différence entre la personne en tant qu'être social et l'affirmation de ses goûts pour le moins personnels. Cet éloge de la médiocrité, ou tout du moins de l'absence d'auto-critique, on en a tous fait l'expérience un jour ou l'autre.
D'ailleurs, si on en croit plusieurs commentaires féminins, ses adeptes sont très présents. Je cite l'un de ces commentaires tiré du merveilleux livre du professeur G.Dupigeon Pour ma piscine, merci :
«- Non, mais t'as vu le copain de Jacqueline? On dirait Emile Louis dans un Sofitel. Dire qu'elle a largué Patrick pour lui...
- M'en parle pas. D'ailleurs, t'as vu la nouvelle copine de Patrick ?
-Non.
- Mon Dieu, on dirait qu'il l'a choisie à la boutique du Sexodrome, rayon mauvais goût. Je me demande bien ce qu'un type comme lui fait avec un pétasse comme elle.»
En fait, le mauvais goût n'existe que dans les yeux normés de ceux qui ne savent de quoi discuter en attendant que leurs chevelures finissent d'être coiffées.

Pour finir, cet article sponsorisé par le Collège de France, je dirais que le monde est un grand magasin. On se perd dans les rayons, des vendeurs essayent de vous attirer vers leur emprise griffue avec leur essence patchouli et leur sourire carnassier. L'endroit est grandiose et on ne sait où donner de la tête; on rêve de se voir passer à la caisse mais en même temps on passe beaucoup de temps à réfléchir afin de retarder ou de minimiser ce moment.
Au final, les soldes c'est comment choper des choses dont au final on pourrait se passer; l'été c'est un peu la chose dont on peut profiter chaque année avec ingénuité- sachant que le rosé n'est pas le meilleur vin à conserver des lustres dans sa cave - et l'amour est peut être encore la seule chose où l'on peut s'affirmer sans craindre quelque chose, enfin en restant dans le cadre de la loi et en faisant attention de ne pas détériorer la baraque à frites de Roger par vos à-coups répétés avec Jean-René, gentil organisateur des Flots Bleus et responsable des activités concours de Hot-dogs.
Bien à vous depuis le castle.
Salucofagos.


mardi 10 juin 2014

Chapitre 15 : Taupe secret.


Le sanglier broutait tranquillement la terre ocre. Peut être cherchait-il quelques pommes de terre, en tous cas il ne semblait guère préoccupé par la présence de Jack.
Jack commençait à sentir les douleurs occasionnées par l'aimable population du château mais il ne pouvait bouger d'un centimètre. Un sanglier est pareil à un pilier de bar alcoolique : si on le dérange on s'expose à une violente réaction.
- Ça ne bouge pas, c'est mou du genou tout ça ! Musique, s'il vous plaît !
A peine Krazu avait-il braillé ces mots dans sa plus belle voix de la Comédie française que les hauts-parleurs diffusèrent des accords pour scouts débutants. Le sanglier leva la tête, interloqué. Puis une voix vint s'ajouter aux notes dégoulinantes. Le coeur de Jack s'arrêta car il ne savait que trop quelle était le nom de cette bouillie nasillarde : c'était Fauve. La bête ne s'y trompa pas et entra dans une violente rage. Son cri couvrit les hauts-parleurs, de la mousse surgit de sa gueule et s'élança rageusement.
Jack grâce à ses études sur l'oeuvre de Carl Douglas réussit à éviter sa charge furieuse.
Alors que le sanglier allait charger de nouveau, Jack se tourna vers lui et mit un genou à terre. Il plaça son bras en avant et fit un étrange signe avec ses doigts. Krasucki découvrit avec grand étonnement que Jack Médecin était aux animaux ce que la Maratrucha était aux concours d'ombres chinoises. L'animal approcha doucement de notre héros. Il vint renifler calmement les doigts de Jack, puis s'agenouilla devant lui.
Krasucki restait impassible alors que ses sbires huaient la scène tels de jeunes mélomane à un concert de Lara Fabian.


Une autre porte s'ouvrit au bout de l'arène. Le sanglier prit peur et alla instantanément se réfugier d'où il était venu. Alors que rien n'était encore apparu, les gradins avaient troqué le folie destructrice pour un brouhaha euphorique. C'est alors qu'un homme sortit de la pénombre. Il avançait doucement; ses muscles se dévoilèrent en premier avant que la lumière des torches ne révèle son visage : c'était Tong Po.
Il y a bien longtemps, jack avait connu Tong Po alors qu'il résidait aux Philippines. Tong Po faisait la tournée des salles de combat et Jack faisait la tournée des ballons de sangria. Tong Po était un vrai guerrier, que ce soit sur l'arène ou quand il recherchait une bonne baise. C'est d'ailleurs ainsi qu'ils se rencontrèrent souvent au Maï Li, le bordel à la mode, non pas de Caen mais de Bayan Ng Coron. Au Maï Li, aucun des deux ne couchaient sur place mais c'était l'occasion de grandes fêtes. Mais suite à un coup mité, Tong Po dut repartir pour la Thaïlande.
Jack reconnu immédiatement son ancien compagnon de beuverie. Son visage amical et doux n'avait pas changé en ses traits. Tout autour, ses muscles s'étaient un peu relâchés sous l'effet du temps mais Jack devinait toujours le puissant combattant qu'il était. Par contre, il sentait aussi que Tong Po sentait le Tong Pol Remy.
Mais sans qu'il ait pu réfléchir à une quelconque stratégie, l'esprit déjà enivré par les parfums d'éthanol, Jack reçu la sandale du combattant à la figure. L'homme avait beau être à moitié à poil avec une sandale au pied gauche et un caleçon rouge en satin décoré de tigres, il ne rigolait pas.
Tel Dany Boon sur un mauvais scénario, Tong po se jeta sur Jack avec fureur. Un terrible corps à corps prit place. Krazu se délectait de voir Jack sans défense.
Jack ne se débattit pas et semblait glisser telle une anguille sur Tong Po. Le guerrier des arrières-cours d'opiumeries essayait de le saisir afin de lui briser la nuque mais son corps suintant l'alcool des jours précédent favorisait Jack. Tong Po commença a pousser des cris et voulu s'échapper mais désormais c'était notre héros médecin qui le tenait; il le tenait fermement et, chose étrange, lui léchait le corps.
Soudain, un éclair aveugla les spectateurs et dans l'arène, Picheman se tenait fièrement debout, un pied sur le corps de Tong Po évanouit.

(A suivre)

lundi 12 mai 2014

Jack Médecin. Première intervention : un récit médicinal.



"Tout n'est que mensonge. La seule vérité que l'on peut entendre dans ce monde est le prix d'un verre quand le barman vous demande de payer."
Cette note fut retrouvée dans un carnet du jeune Jack Médecin après sa disparition du campus d'Ingolstadt.

Après une adolescence banlieusarde et un bac tout aussi médiocre, le jeune Jack s'inscrit en médecine et partit pour la Bavière. Tout se passa pour le mieux jusqu'en décembre.
Alors que les premiers examens arrivaient et que le vent et la neige prenaient possession de la ville, les camarades lui firent découvrir une tradition locale : les brauhaus; ces énormes brasseries où la bière coule par litres jusqu'au petit matin entre charcuterie et fumée de cigarettes.
Le jeune étudiant fut ébloui par tant de chaleur et de chopes pas chères. Petit à petit, il vint de plus en plus souvent en ces lieux et surtout de plus en plus seul.
A l'université, ses notes commençaient à chuter dramatiquement. Les professeurs ne l'appréciaient guère car depuis peu Jack remettait constamment en question le contenu des cours. Même ses camarades s'éloignaient de lui : il était de plus en plus solitaire et il avait même refusé d'entrer dans la confrérie Kopf und knochen.
Quand il n'allait pas rêver et oublier d'étranges idées noires au fond des verres, il se passionnait pour l'étude du foie et du système digestif. En fait, seul Herr Ude son professeur dans ces matières le voyait souvent. On pouvait même les apercevoir ensemble dans un coin reculé de la brauhaus de la grande place. Ils venaient régulièrement et avaient des conversations passionnés que les sons de la joyeuse clientèle rendirent secret à jamais.
Un soir de Janvier alors qu'un sale temps hivernal soufflait sur la ville, le professeur Ude fut retrouvé assassiné dans une ruelle. Après enquête, la police conclut à un meurtre crapuleux et fait étrange : à l'intervention d'un maniaque qui une heure ou deux après le décès découpa et emporta les viscères du malheureux.

Hanz-Hubert Katzfried était un jeune étudiant de 19 ans. Ne suivant pas le même cursus, il ne connaissait Jack Médecin que comme voisin de chambrée, et seulement de vue. Dans le grand hall baroque, il n'y avait que peu de résidents dans les 16 chambres du grand couloir aux voûtes boisées. La crise immobilière que la région subissait depuis quelques années avait libéré de vastes appartements en centre-ville. A cent mille lieues des couloirs sombres et oppressants de l'université, beaucoup d'étudiants avaient choisis les maisons bourgeoises de l'hyper-centre. Ainsi, seuls un étudiant chinois, un fribourgeois, Hanz-Hubert et Jack qui occupait la chambre voisine, occupaient le premier étage de l'aile ouest. Cette année, la neige et les forts vents du Nord balayèrent la ville jusqu'à mi-avril, Hanz-Hubert comme beaucoup ne sortait que peu afin de ne pas affronter la tempête, il ne s'étonnait donc pas de ne pas voir souvent son voisin. Quelque fois, il entendait d'étranges grognements à travers le mur et les lambris. Certaines nuits, ces grognements s'accompagnaient de cliquetis de verre et d'un petit rire à peine camouflé.


Durant la fin février, une atmosphère de plomb s'était abattue sur les couloirs de l'université enneigée : plusieurs personnes furent retrouvées mortes dans la ville et des vols d'organes avaient été constatés au sein de l'université.
Lors d'une nuit où le vent rugissait à l'extérieur, la cloche de l'université se mit à sonner furieusement : un feu s'était déclaré dans le bâtiment à cause d'un coup de vent qui fit tomber des bougies sur des rideaux.
Hanz-Hubert rassembla deux, trois affaires et sortit de sa chambre. Alors qu'il allait suivre ses compagnons de dortoir, il entendit des bruits provenant de la chambre voisine. Son occupant ne semblait pas vouloir évacuer; pire, il ne semblait pas entendre la cloche de détresse.
Hanz-Hubert toqua à la porte mais seuls des grognements indistincts passèrent à travers la porte de bois. Le jeune berlinois essaya d'expliquer la situation et le fait qu'il valait mieux évacuer le bâtiment quelques minutes afin d'éviter une possible exclusion, mais avant qu'il ait pu avoir une réponse, un cri retentit alors que les sirènes des pompiers s'étaient jointes à la cloche.
La porte était fermée, elle ne céda que sous les coups répétés d'extincteur. Le vent du nord et la neige fouetta soudainement le visage du jeune étudiant. Quand il ouvrit les yeux, une sensation de terreur couru le long de sa colonnes vertébrale. Dans la pièce sombre, plusieurs appareils digestifs étaient entreposés sur des cintres. De longs tubes et tuyaux se glissaient entre eux, chacun semblait être relié à une grand cuve en amont et une autre en aval; et tous, bien qu'en dehors de tout corps humain semblaient vivants. La pièce sentait la brasserie en fin de week-end : elle empestait l'alcool et des dizaines de bouteilles vides d'alcool fort traînaient dans la pièce battu par le vent. La fenêtre était grande ouverte, Jack avait dû s'enfuir alors que sa porte allait être enfoncée. Il en restait plus que quelques cahiers et feuilles volantes non loin du petit bureau. Sur l'une d'elle, poussée par le vent, était griffonné sur toute sa surface un mot : Picheman.
La police et l'université firent fermer la chambre et l'affaire fut étouffée mais ils ne retrouvèrent pas les notes et les cahiers. Hanz-Hubert laissa la porte ouverte et se garda bien de dire qu'il avait pénétré dans cette pièce; il ne finit pas son année et personne ne sut vraiment ce qu'il advint de lui par la suite. Quand à Jack Médecin, c'est une autre histoire. Une histoire dont lui-même n'en connaît pas la fin.

vendredi 9 mai 2014

In Bloom


Ah mes amis... Mes chers amis...
Au moyen-âge, il y a avait la trêve hivernale, mais comme vous avez pu le constater il y eut également la trêve printanière ici-bas.
Une tonne de choses à faire, que dis-je ! Des millions de feuilles à rédiger afin de s'assurer un avenir, certes pas plus radieux, mais au moins pour apporter un peu de lumière sur le CV.
Bref, c'était long et fastidieux mais le bout du tunnel se rapproche.
Ainsi, ce week-end, vous aurez le droit à un retour en fanfare du blog saveur vanille et de sa mascotte Jack Médecin !
Et comme disait notre ami Mao : Le chemin est sinueux mais l'avenir est radieux.
Salucofagos.


lundi 17 mars 2014

Sept lieues.



En attendant un nouveau chapitre du formidable Jack Médecin, voici un petit compte-rendu rapide des derniers films visionnés (ou revisionnés) depuis ces dernières semaines.

La chute de l'empire romain : un grand spectacle d'Anthony Mann. Film qui marqua la fin des péplums mais dont on ressent toujours la démesure. Si l'on met de côté l'historicité douteuse, les acteurs sont extra, les décors impériaux etc. Très bon point surtout pour la psychologie tout en nuance des personnages ( notamment Commode ). Bref, du spectacle en cinémascope du vrai.

Silent Hill 2 : Après un premier opus très honnête et fidèle au jeu, nous voici dans une suite qui essaye de (nous ?) promener librement avec ses gros sabots. Des acteurs n'ayant pas encore validé leur premier semestre de BTS théâtre à Villedieu-les-poêles; une histoire foutraque et totalement inintéressante -même quand on connaît les jeux; beaucoup trop de caméo, histoire de coller un peu au premier film (Sean Bean cachetonne joliment et j'espère qu'avec le chèque il a réussi à refaire la porte de son garage). Bref, fuyez !

L'homme qui tua Liberty Valance : un classique. C'est beau, c'est intelligent, c'est bien joué, pas grand chose à ajouter. L'exemple même du film intelligent qui est toujours là où on ne l'attend pas et s'amuse avec les codes. Un tournant dans l'histoire des westerns et un grand moment de cinéma.

Detective Dee : Le retour du grand Tsui Hark ? Oui et non. Le film est, il faut le dire, très beau et superbement réalisé. Tsui Hark ne tombe pas -trop - dans son habitude de traduire le chaos à la caméra. L'histoire à la fois policière et fantastique est honnête et les scènes de combats sont tout simplement magnifiques. Seuls les effets spéciaux marquent un point passable : ils sont honnêtes mais pas forcément des plus réussis et surtout il y en a beaucoup pour un film du maître. Peut être pas son meilleur film mais un excellent film tout de même.

Hondo : un western sans prétention avec le Duke. Des idées intéressantes, de bons dialogues mais au final un film un peu longuet. A réserver au amateurs débutants de westerns au aux fans de John Wayne.

La prisonnière du désert : Peut être mon John Ford préféré (avec Liberty Valance). Une histoire qui joue avec le temps comme la caméra joue avec les panoramiques et les intérieurs. Un grand John Wayne, une reflexion bien dosée, un peu d'humour et les décors de Monument Valley. Un chef d'oeuvre.



Event Horizon : Un classique des films méconnus. Malgré la paternité de Paul Anderson (le tâcheron des Resident Evil et dernièrement Pompei), le film mêle habilement horreur et SF. L'ambiance est grandiose, les acteurs nickels et le scénario très réussi bien qu'il ne soit pas d'une originalité exceptionnelle. Un classique en devenir du genre.

Le conquérant : John Wayne en Gengis Khan . De la romance, des batailles à cheval, de grands sentiments, bref tout l'attirail d'une grande production cinémascope des années 50. A réserver pour les dimanches après-midi pluvieux car le film est sympathique ( ce n'est pas forcément un compliment ) mais on n'y croit pas trop

Maigret tend un piège : Audiard aux dialogues d'après Simenon et Gabin en Maigret. Un bon moment mais un film qui ressemble plus aux Tontons flingueurs qu'à un Maigret. A voir quand on aime Audiard et Gabin, à éviter quand on préfère l'oeuvre de Simenon.

Pénélope : Une bonne comédie d'après la BD de Pénélope Bagieu. Très girly -forcément - mais un film qui peut plaire à tous ( à réflexion, peut être pas aux fans de tunning). Même si l'histoire de base est vue et revue, le film parvient à surmonter cela en nous faisant passer un bon moment de détente. Une très bonne surprise et un très bon moment en somme.

Almighty Thor : la version Asylum de Thor. Un grand moment quand on aime les productions Asylum et les films de qualité : c'est moche, c'est n'importe quoi et on se demande qui regarde ça. Du grand, je vous dis; à voir en VF bien sûr.

Aztex Rex : Cortez qui conquiert le nouveau monde avec 8 mecs + 8 aztèques qui se planquent dans la jungle bien balisée d'Hawaï + un T-rex = CQFD.

Poseidon Rex : regardez le commentaire sur Aztec Rex (ci-dessus) et imaginez le reste...

Le Grand McLintock : un western comédie dont on ne garde pas vraiment un grand souvenir. Un peu long, un peu lourd, un peu nul, un peu ringard. Un film pour les fans hardcore du Duke, ou pour les souvenirs d'enfance de certains.

lundi 10 mars 2014

Götterdämmerung (2/3)

                                   

Nous avions donc laissé nos deux amis érotomanes Siegried - dit le benêt beatnik - et Gunther - dit un homme bien brave mais un peu con - en route pour une soirée d'amusements répréhensibles par la loi sous le nom de viol. Ils voguent tranquillement sur leur coquille de noix.
Au même moment, la dite victime, Brünnhilde, reçoit fort aimablement sa soeur Waltraute - dite la vieille fille au prénom moche. Brünnhilde ( qui ne porte pas non plus le plus beau des prénoms de la Terre ) comme à son habitude oublie de prendre ses cachets et continue gaiement sa vie sur le chemin de la schizophrénie. Elle apprécie sa belle vie de ménagère, sa radio branchée sur Punk Fm pour faire la vaisselle et son abonnement à Maison, cailloux et déco magazine, mais elle espère toujours un signe de son vieux papa pour réintégrer le manoir familial.
C'est alors que sa soeur arrive : imaginez ses neurones de fille à papa rebelle. Malheureusement, Waltraute lui annonce que Papa Wotan est devenu complètement gâteux ( oui, plus qu'avant ). Le vieil animal aux plans d'un machiavélisme de garderie reste désormais affalé dans son rocking chair à regarder les murs d'un oeil glauque.
Bref, sa soeur la supplie de renvoyer l'anneau dans le Rhin, histoire que tout le monde soit sauvé et que papy Wotan puisse au moins une dernière fois compléter son Télé 7 jours vacances spéciale mots croisés. Les réceptions de l'ambassadeur sont bel et bien finies pour la rebelle; elle regarde au tour d'elle : un rocher pourri pour maison, trois casseroles, un aspirateur sans sac de rechange et trois surimis dans le frigo... Ses tares génétiques s'ajoutant à ses pilules d'acide mal digérées, ses neurones explosent et elle s'énerve : elle vire sa soeur à coup de casseroles et par la même occasion balance par-dessus le rocher ses trois surimis.
N'ayant pas grand chose à casser sur son caillou, Brünnhilde s'agite dans tous les sens de désespoir, mais voilà que le cor de Siegfried retentit; c'est une sorte de sonnette portative.
La jeune punk se précipite vers le pas du rocher mais ce n'est pas son hippy préféré qui s'installe avec son pack de bière dans le canapé mais Gunther, le roi benêt, et avec les bottes aux pieds qui plus est !

Pendant ce temps là, le vrai Gunther attend un peu plus bas. Car souvenez-vous que dans ses dernières heures avant l'hospice, papy Wotan a mis le feu au rocher et seul Siegfried peut le traverser grâce à ses vêtements de vulcanologue et à sa grande imbécillité. A propos de crétinerie façon cinemascope, le brave hippy a donc pris la forme de son ami Guntherinou grâce au heaume magique pour qu'elle ne puisses pas dire qu'elle n'appartient pas à ce dernier; décidément les gros malins se bousculent sur les bords du Rhin.
Ainsi donc Siegfried agit en véritable homme - des cavernes - il lui arrache l'anneau du doigt et doit sûrement la trousser quelque peu car bon, pendant qu'il était sur sa lancée il n'allait pas se refuser grand chose. Pour finir, il l'assomme avec l'aspirateur et l'embarque avec lui dans la barque où d'ailleurs le vrai Gunther ne manquera pas de la tripoter un minimum, lui rappelant ses soirées à Pigalle.

                                 

Dans le palais des Gugu, nous retrouvons Alberich, le personnage que l'on voit depuis le début mais qui ne fait absolument rien à part gueule comme un putois contre le monde dans l'obscurité. Le vieux machin annonce au machiavélique Hagen que ce dernier est en réalité son fils. Non content d'aller harceler bite-en-avant les filles du Rhin, la bestiole allait aussi se soulager entre les cuisses des schön fraulein des alentours. Alors comment il a fait pour se faire la reine, on ne sait pas - et on ne veut pas savoir - mais toujours est-il qu'il ordonne à son fils de récupérer l'anneau; lui étant sûrement trop idiot pour ça vu ses tentatives dans les trois opéras précédents.

Mais voilà que l'embarcation des aventuriers du viol arrive au palais. Heureux et détendus comme de jeunes puceaux après une nuit offerte dans un boxon, Gutrune se doute que quelque chose ne va pas et se précipite sur Siegfried, l'homme au sourire béat et à la braguette béante.
Elle le questionne tel un policier devant un jeune à capuche mais Siegfried lui assure qu'il n'y a rien eu entre lui et la jeune rebelle aux vêtements déchirés. Ils s'embrassent, ils se pelotent, c'est la fête, du coup le bon Hagen qui n'est jamais le dernier sur la bière, les jambonneaux et la charcuterie décident de les marier sur le champs.
Ainsi, on fait rentrer les tonneaux, les invités et donc Gunther et Brünnhilde. Vous imaginez bien qu'elle est un peu surprise de trouver son mari là surtout en tant que marié du jour; de plus, le gugus est aux fraises et ne la reconnaît pas d'un poil. Entre deux mains aux fesses et trois "Et glou et glou", elle aperçoit l'anneau précédemment arraché au doigt du marié. Et là, c'est la fin de tout : un autel de violence dans la cathédrale du pétage de plombs.
La vaisselle vole, les injures pleuvent, la charcuterie diminue et les tabourets s'écartent.

(A suivre)

mercredi 26 février 2014

Vers l'infini bleu azur au-dessus de lui.


Un léger sourire flotta soudain aux coins de ses lèvres. Minoru se hâta de détourner les yeux, mais son cœur battait à tout rompre, et les muscles de son visage se contractaient indépendamment de sa volonté. Il ne pouvait plus feindre.
Le service religieux s'acheva. Bousculant les gens qui autour de lui se levaient lentement pour ménager leurs genoux ankylosés, Minoru quitta la salle le premier et se sauva à petites foulées par les sentiers en bordure de rizières, où tremblaient les épis. Il n'avait qu'une crainte : qu'Otowa se lance à sa poursuite et le rattrape. Il courut un moment le long des fins canaux d'irrigation mais, au moment où il se retournait pour évaluer la distance parcourue, il aperçut la silhouette de la jeune fille s'élançant vers lui.
"Minoru !"
Sa voix aiguë lui parvenait au milieu du bruit des rafales de vent. Il détala à nouveau mais elle le rattrapa, le saisit par-derrière à bras-le-corps, et tous deux roulèrent au milieu des épaisses touffes de roseaux. Minoru fit deux ou trois pirouettes sur le sol, enveloppé par le jeune corps qu'il sentait à travers le coton léger du kimono de Kurume et le doux parfum qui en émanait.

Hitonari Tsuji; Le bouddha blanc; Mercure de France collection Folio, 1999 : p.52-53

dimanche 23 février 2014

Cindy (7e partie)

Héhé, grosse rigolade.
Mes amis, mes chers, mes doux amis, je sais que vos esprits mélomanes l'ont longtemps attendu mais reprenez forces et sourires car elle est là : la suite de Cindy, cendrillon du ghetto.
Nous allons enfin plonger dans l'acte II et dès les premières minutes, le ton est donné : aucune chanson ne dure plus de deux minutes; nous avons donc un concentré de médiocrité et d'horreur. Cindy, le pulsar de la ringardise. Bref, c'est toujours aussi grandiose. Mais ne perdons pas de temps et aventurons-nous sans plus attendre de nouveau dans ce monde féerique.

Ricky déchaîné se touche la nouille.
Premier extrait pour tes oreilles.
L'acte II commence avec une somptueuse musique de guitare, dont les notes et le ton font penser à un sympathique pique nique de jeunes amateurs de bières peu chères sur les abords d'un parking de supermarché. Cindy est toujours là, et il faut dire qu'on ne la voit pas au premier coup d'oeil tellement le poster de Ricky derrière elle est ignoble : photo peu flatteuse, couleurs criardes et festival du gros pixel.
"Ce bal maudit/ que j'ai fui/ sur les douze coups de minuit" Décidément, le deuxième ne baisse bas les bras au grand concours des rimes simples et affreuses.
"Cindy loves Ricky/ Mais Ricky aime-t-il Cindy ?" Plus qu'une comédie musicale, Cindy 2002 c'est également une réflexion profonde et nouvelle sur l'amour. Ce qui se confirme quelques lignes après : "mais attention, je te préviens : si tu m'aimes/ il faudra que tu m'aimes pour moi même."
"J'ai l'impression d'avoir commis comme un hold up/ d'avoir volé ton coeur au revolver" Non mais qu'est-ce que s'est que cette histoire de hold-up ? C'est censé se dérouler en banlieue du coup on sort les clichés ? Belle mentalité !
D'ailleurs, entre deux idioties braillées la jeune gourdasse se fait visiblement chier et n'arrête pas de faire des aller-retours sur scène, en lançant de temps à autre un léger sourire au public, mi-timide mi-molette.
Et voilà qu'arrive le grand moment de cette chanson : niveau scénique et niveau dialogue, of course.
"Envoyez une armée de tagueurs écrire en graffiti sur les murs de la vie : Cindy loves Ricky.
Lâam beugle en faisant semblant d'y croire, vraiment seule sur scène, avant de finir dans une position que ne renierait pas l'association des gentils proctologues. Et au passage, on ressort quelques clichés de jeunes avec les graffitis; mais on le remarque tellement le passage des "murs de la vie" nous subjugue.

Merci, Ricky et Michel.
Deuxième extrait pour tes yeux.
D'ailleurs, cette position tombe plutôt bien car la suite arrive en s'ouvrant sur un magnifique fond musical digne des plus beaux (et pauvres) films de cul.
Les deux soeurs arrivent vers Cindy qui passe la serpillière. Toujours affublées d'horribles costumes lila, elles ressemblent désormais à des personnages des Mille et une nuits version destockage chez Tati Roumanie. Bien qu'on commence à voir du cuisseau et du décolleté; ce n'est jamais négligeable.
C'est un - atroce - dialogue musical qui suit, où notre souillon préférée vocalise sur des "et elle ?" et des "et lui ?".
Sans vous faire subir les rimes atroces - si, plus encore que d'habitude; c'est possible - en gros Cindy demande comment était le bal et que le priapique père Rickounet a fini la soirée avec une princesse orientale. Quel monde cruel.
Un bel exemple d'ironie tragique; Sophocle, tu peux aller te rhabiller. Cindy pense que ses soeurs parlent de quelqu'un d'autre alors qu'il s 'agit bien d'elle. Par contre, ne pensez surtout pas que cette histoire ira plus loin que ça.

Tout est dit...
Troisième extrait pour ton cerveau.
Le plus beau du piano façon Pascal Obispo agrémente des ralentis des danseurs gigotant du jambon avec leurs costumes premier prix des salons ras des fesses.
Puis arrive la guitare ringarde; on pense voir arriver Guns and Roses ou bien Dousseur de vivre mais c'est seulement Ricky qui s'offre à nous.
Une danseuse passe dans le vide attachée à une corde en tournant sur elle-même. Elle doit sûrement représenter la femme tentatrice et matrice des désirs et des passions, mais nous ne voyons qu'une pauvre femme qui pendouille mollement dans ce grand vide scénique et intellectuel.

Devinez lequel se sent le plus seul.
Et là, on touche le chef d'oeuvre mes cocos ! On en comprend pas un broque de ce que dit l'ami Ricky- enfin si peu. On comprend KO et que c'est la faute des femmes, en gros.
"Pourquoi faut-il se cacher pour pleurer , " revient souvent, et bien que les oiseaux se cachent pour mourir Ricky se fait de fait le chantre de la masculinité affirmée et de la réflection moderniste sur la célébrité et son aliénation. D'ailleurs, à propos de cacher Ricky à oublié de couvrir ce sein que l"on ne saurait voir; mais bon que voulez-vous : quand on a la classe...
Mais pourquoi il doit toujours gesticuler comme ça ? Il le pense peut être mais ce n'est pas sexy; au mieux on pense qu'il a envie de vite délester sa vessie, au pire il passe pour un gros pervers.
Et en plus, il fait "wao hoho" comme un chanteur de RnB en veux-tu, en voilà.
Et pendant que notre Ricky national braille son charabia de jeune Werther, les danseurs nous offre en-dessous une très belle chorégraphie en forme de partouze dont les accents rappellent le travail d'un enfant de trois ans saoul. Oui, tout ceci est illégal.

La classe, la vraie.
Quatrième extrait pour ce qui marche encore.
Pour poursuivre, le joyeux producteur vient faire le récit de son enquête au chanteur chevelu. En résume, il est aux fraises et propose de faire une audition pour la retrouver; et bien sûr ça sera une audition de gigue... Donc Ricky va auditionner pour son nouveau clip suite à quoi il déclare : "Je retourne à mes racines". Là, c'est vraiment pour meubler et faire une rime car on se souvient que ses racines sont dans le montrage de derrière dans les bars de Manchester. Bref, rien de bien folichon dans cette scène où même la vulgarité de Ricky ("Je m'en fous, retrouve-moi la fille!") ne nous choque plus.
Une musique au accent orientaux - enfin aussi oriental que le taboulé Garbit - fait office de liant dans cette grosse soupe ( j'ai même envie de dire souplette) bien épaisse; j'ai bien dit aux accents car sinon elle ressemble plutôt à un spot de cinéma de province pour la boutique de Jean-Michel Robinet, le spécialiste de la cuisine équipée à Vierzon.

Il y en a au moins une qui maîtrise un brin le tendu.

Cinquième extrait pour le plaisir.
La belle mère revient avec la même musique qu'au début; oui, chez Cindy on se fait pas trop chier niveau créativité - et je ne parle même pas de qualité.
Bon, Cindy doit apprendre la gigue à ses belles-soeurs. Voilà-voilà.
Sublime moment de la comédie musicale : la fameuse gigue - avec laquelle on nous rabat les oreilles depuis le début - est enfin dansée. Cindy qui danse celle-ci, c'est un peu comme regarder les monceaux d'algues verdâtres portées par l'écume sur la plage, ou bien voir danser devant soi un gros morceau de pâté de foie.
A la fin, tout le monde danse en même temps; sans sens du rythme ou de la coordination, on assiste alors à un spectacle digne des plus belles basse-cours.
Une prestation que l'on peut considérer comme filée puisque juste après la joyeuse troupe des danseurs ratés débarque et se mettent à gesticuler dans le même esprit sur cette musique qui commence vraiment à devenir très, très, énervante. C'est le début de l'audition.
Mais, mes doux amis, reposons nos âmes, nos iris et nos oreilles à vif et nous reprendrons notre merveilleux voyage très prochainement. En plus, je ne dit rien mais ça va être grandiose avec notamment la fameuse rave party. Vous pouvez faire confiance à Cindy.

dimanche 16 février 2014

Pâté de tête et gélatine.



A Hollywood, les martiens, les terroristes et les agents secrets se mêlent à nous. Ils sont partout et nulle part à la fois. Ces êtres étranges passent inaperçus sous nos yeux innocents. Malheureusement, tout comme les aventures de Donald Sutherland dans Invasion of the Body Snatchers (L'invasion des profanateurs en vf), tout ceci n'est que du cinéma, mais rien ne prouve que cela n'est pas vrai et qu'on ne minimise pas la situation. En fait, notre société est déjà en danger !
Regardez bien autour de vous : dans les transports, dans les salles d'attentes, dans les jardins publics, dans les moments de détente, dans votre propre salon et même dans votre propre lit. Ils sont partout !
Les gens autour de vous ont le nez rivé sur leurs écrans. Ils ne vous voient plus; leurs yeux vitreux sont soutenus dans leur obsession par la viscosité de leurs ouïes et de leurs langages.
Ils sont tombés sous l'emprise de Candy Crush.

Un jeu où le but est d'aller le plus loin possible en réalisant des combinaisons de machins colorés. Il paraîtrait même que les concepteurs du jeu ont  produit une histoire pour vous accompagner lors de vos 500 tableaux à finir; personnellement, je n'y croit guère. Tout le monde zappe cette vilaine partie où l'on peut admirer une petite fille insupportable qui a trop mangé de gratin dauphinois et une espèce de Monsieur loyal rouquin qui bondit sur votre écran tel un membre du bas clergé berrichon sur un enfant de choeur.
Donc, le but est de faire des combinaisons d'éléments afin de faire des points et/ou de détruire certains éléments suite à leurs destructions. D'ailleurs, ces éléments sont supposés être des bonbons mais selon mon cortex visuel je vois des saucisses, des citrons, des feux d'artifices dans des boules à neige, des boules de produit pour le linge, des framboises et des blocs cuvettes WC saveur menthol.

C'est gratuit, il y a plein de couleurs pour illuminer ton couloir de métro donc forcément les gens aiment bien. En plus, tu peux y jouer depuis Facebook. D'ailleurs, c'est la que l'Apocalypse arrive : tout le monde est au courant des niveaux de chacun - surtout quand tu n'y joues pas - et si tu y joues tu auras le bonheur de recevoir mille notifications qui vont faire vibrer ton portable ou illuminer ta fenêtre, tout ça parce que Albert est généreux et t'envoie des vies. Plusieurs fois par jour, votre coeur s'emballera suite à une notification. Votre portable qui vibre dans votre poche : serait-ce elle ? M'a-t-il répondu ? Eh, soudainement, la tristesse frappe entre vos deux ventricules et déchire votre petit muscle en deux : c'est seulement Gertrude qui vous envoie une notification Candy Crush.

C'est là que vous vous rendez compte que d'avoir téléchargé le jeu, pour à peine passer le niveau 40 en quatre mois, commence à revenir cher. Mephistophélès réclame son dû et votre vie commence à devenir aussi triste et terne qu'une rame de métro au milieu des joueurs de Candy Crush. Au moins, quand tout le monde se coupe du monde en mettant ses écouteurs, on peut toujours se regarder.
Mais non, désormais c'est souvent Candy Crush ET les écouteurs !
Seigneur, que d'épreuve Tu nous fais subir ? Surtout, avec ses saloperies de carrés de chocolat qui popent partout et te bouffent tous tes mouvements !

lundi 10 février 2014

Ticket, s'il vous plait.



Un peu (beaucoup) de retard pour cet article, mais les deadlines des travaux et surtout la qualité d’un fournisseur internet qui aime te donner – ah non, te louer, pardon – de jolies box qui n’aiment pas bien fonctionner ; sinon ce n’est pas drôle. Heureusement, maintenant, tout est réglé et on va pouvoir repartir hebdomadairement du bon pied.

Amis des transports et de l'agression visuelle, bonjour.
Car oui, souvent je parle des sympathiques publicités que l'on peut admirer dans les couloirs en émail du métro parisien, mais n'oublions jamais que ces mêmes oeuvres d'art modernes peuvent aussi s'offrir à nos yeux aux bords des routes. En ce moment, c'est l'hiver : il fait froid et les virus se développent et viennent nous faire souffrir sans autre motif qu'un sens aiguë du sadisme. Ce qui est plus préoccupant c'est que la même chose se passe dans la publicité.
On connaissait déjà les pubs TV de voitures à base de 'je suis français, j'aime faire mon ptit malin' ou bien de 'je suis allemand, j'aime l'eurodance dans mon autoradio', mais là, ce sont carrément des clones qui arborent les murs en même temps.
Commençons tout d’abord par Virgin Tonic. Une bonne image de vieux trentenaires sur le retour est véhiculée. Une photo parodique de Friends (oui, la sitcom dont seuls ceux qui ont plus de 25 ans peuvent aimer, par nostalgie). On y trouve Florian Gazan - je passe sur sa carrière très ancrée dans les années 90 - avrc un beau T-shirt des Dents de la mer; certes un classique mais depuis on en a vu défiler de la péloche. Ensuite, on trouve deux beaux no-name dont la trentaine doit être moribonde et Lucienne, l’octogénaire que l’on voit partout sans trop savoir pourquoi. Bref, on nous met devant les yeux une belle tripotée de médiocres en train de siroter des milkshakes ; le problème c’est que cela donne le même effet que de voir Jean-René Ducloux avec son Frapuccino derrière une vitrine au détour d’une rue.
Et puis regardez-moi tout ce bronzage intensif ; ça pique les yeux tellement il y a de la peau orange (peut même d'orange). Les vieux beaux/fs.

On a également l’honneur de voir Manu en format Cinémascope. Tout comme Florian Gazan, Manu est une personnalité bien connue du monde de la radio, enfin surtout connu des personnes écoutant la radio il y a plus de 15 ans ; d’ailleurs on peut le voir rien qu’à se garde robe ringarde de vieux voulant se faire passer pour jeune – ou alors de jeune ne voulant pas grandir mais je ne suis pas docteur. Habitué de l’émission matinale qui te ‘paye ton loyer’ chaque matin – entendez là que chaque matin, la radio paye le loyer d’une personne (si possible d’un 9m² à Besançon) – la pancarte te brandit devant les mirettes un gros « dix fois ton loyer ». Sauf que si on regarde de plus près l’affiche de publicité se la joue contrat bancaire/ assurance avec ses petits caractères énigmatiques. En effet, le photoshop changeant le x2 en x10 et aussi fallacieux que son message car ce ne sera pas tous les jours que votre propriétaire fera péter le champagne mais une seule fois. Une sorte de 14 Juillet des ondes en somme.

Sur les murs de carrelage made in WC du métro parisien, on peut enfin admirer le faciès heureux de Bruno le sympathique. J’ai rien contre ce brave garçon qui doit être la fierté de sa maman et de son village charentais avec son sourire naturel et sa coupe de footballer – tout aussi naturelle. L’ami Bruno se propose donc de « payer nos factures » et donc se la joue club de striptease à distribuer ses billets. Il fait le malin avec ses billets de cent mais je suis sûr que si on lui présente une belle facture se rapprochant d’un nombre à trois zéro, il fait moins le malin. En plus d’avoir l’image d’un Don Juan de mariage pas cher, le sympathique Bruno nous est présenté avec moult traces de rouge à lèvre sur le visage. N’étant pas étranger aux gender studies, je n’émettrai pas de théories sur leurs origines, par contre je ne peux m’empêcher de penser à une sorte de prostitution. Il faut bien montrer un peu d’affection à l’homme qui nous a payé nos factures ; d’ailleurs vu son métier et ses publicité je me demande si l’aimable Bruno ne se prostitue pas lui-même.
Je le vois bien me jeter ses talbins au visage en me criant "Vas-y danse! Danse pour moi!".
En tous cas, ça racole pas mal dans le métropolitain et cela on ne peut le nier.

lundi 13 janvier 2014

Home Sweet Home.


Nous avons la belle vie : nous avons des armées d'accueillants supermarchés pour nous sustenter et de charmantes publicités pour nous prodiguer idées et conseils toute la journée.

Souvent on voit marqué "comme à la maison". Quelle belle initiative !
La larme me monte déjà lorsque je vois des personnages qui m'inspirent confiance : Mamie Nova, Captain Igloo et Franck Provost. Tous ces personnages qui me rappellent cent mille choses : une vieille sorcière qui aime à chaque fois te parler de "la guerre", un vieux pervers oscillant voguant entre alcoolisme et pédophilie et un ancien chanteur disco italien (qui va transférer son âme maléfique dans un clone qu'il fait passer pour son fils).
En plus, de la jouer sentimental, les produits veulent également te signifier que tout ce que tu trouveras dans ton sachet ou ta boîte de conserve a été préparé par amour par une charmante mamie dans son modeste fermette du Berry. Honnêtement, vous y croyez ? On a beau nous cracher du rêve au visage toute la journée, je ne me souviens pas avoir vu ma mère mettre de l'huile de palme ou de E123 dans l'osso bucco, ni ma grand-mère se transformer en Pablo Escobar du pot-au-feu.
Mais où est l'intérêt d'acheter du comme à la maison, puisqu'on le mange justement chez soi ? Bien sûr, cela vaut pour quand on fait un tant soit peu la cuisine; mais au final, ton surgelé a également un certain goût suivant le temps de cuisson, ton four, ton frigo etc. Donc il y aura toujours ton petit côté 'maison'.
le seul côté maison que tu auras avec Papa Findus, Papy Brossard ou Tatie Franprix sera le ferrocyanure de sodium (E535) qu'un gentil employé viendra verser par kilos dans la grand matrice; ainsi tu passeras du "putain, c'est dégueulasse!" à "Oh c'est pas mal, on à même l'impression que la viande n'est pas reconstituée".
Et puis, je suis désolé mais quand on me dit "comme à la maison" personnellement cela m'évoque au choix : l'insipide ou bien le médiocre.
Si j'achète des trucs tout fait, c'est justement pour ne pas subir ma pauvreté culinaire qui s'épanouit dans ma demeure comme une jeune gourgandine dans un bar nocturne.
Tout comme quand je viens me restaurer chez les autres, je n'achète pas des trucs tout fait pour manger de la merde : j'en mange déjà assez chez moi.
Last but not least, on dirait franchement que les entreprises agro-alimentaires se justifient de vendre des produits un peu moins mauvais que d'habitude. Ils ne doivent pas avoir l'habitude, ou alors ils doivent vraiment penser qu'on aime ça.
Enfin bon... Bonjour chez vous en tous cas.